Les trois juges d’instruction en charge de l’affaire du Carlton de Lille sont actuellement sur une nouvelle piste qui risque d’incriminer encore plus l’ancien patron du FMI, Dominique Strauss-Kahn.
Selon une information révélée par Libération ce vendredi, les trois magistrats ont requis un réquisitoire supplétif pour viol en réunion le 28 mars dernier au parquet de Lille.
Mis en examen le 26 mars pour proxénétisme aggravé en bande organisée dans l’affaire du Carlton de Lille, DSK risque une nouvelle charge, celle d’un viol en réunion. La décision du parquet de Lille sur le réquisitoire supplétif, déposé le 28 mars par les trois juges en charge du dossier concernant un viol en réunion, est effectivement attendue « la semaine prochaine, afin de ne pas perturber le scrutin présidentiel », précise le quotidien.
Cette procédure fait suite aux dépositions de deux prostituées belges concernant des faits qui remontent en décembre 2010. Marie-Anne S., alors âgée de 25 ans et Aurélie D., 26 ans et présentées comme des « secrétaires d’Eiffage »ont été conviées pour accompagnerJean-Christophe Lagarde, David Roquet, respectivement commissaire, ancien chef de la sûreté à Lille- mis en examen lui aussi-, et chef d’une filiale d’Eiffage, pour rendre visite à DSK à Washington entre le 15 et le 18 décembre 2010. Fabrice Paszkowski, celui qui communiquait avec DSK à travers plusieurs textos, faisait également partie du voyage.
Le soir du 16 décembre, DSK et ses « amis » nordistes se seraient rendus dans la chambre d’hôtel de Marie-Anne, plus connue pour son pseudo Marion. Dans sa déposition en date du 5 décembre 2011, elle soutenait que le patron du FMI avait « utilisé la force, c’est-à-dire qu’il me tenait les mains. Il me tirait les cheveux, il m’a fait mal ».
Marie-Anna a aussi allégué que DSK voulait même la « sodomiser ». « J’ai refusé en lui disant non, je ne veux pas. J’ai essayé de me dégager mais c’était compliqué car il était sur moi et il est très lourd […]. Certes, je n’ai pas hurlé, mais j’ai dit clairement que je ne voulais pas, à plusieurs reprises à haute voix », a-t-elle expliqué.
Questionnée par les policiers si les hommes qui accompagnaient DSK ce soir là ont essayé de s’interposer, elle a répondu : « Fabrice (Paszkowski, ndlr) ne s’est pas interposé, Jean-Christophe Lagarde n’a rien dit ». David Roquet, pendant ce temps, l’aurait immobilisée en lui tenant par les poignets.
« J’ai trouvé que DSK était un pauvre type car il ne savait pas respecter l’autre. […] Je le crois capable d’avoir été violent », rajoute la jeune femme en précisant cependant qu’elle n’envisage pas de le poursuivre en justice. « J’étais présente pour certaines choses », affirme-t-elle.
Elle a aussi confié aux enquêteurs que l’ex-patron du FMI savait pertinemment que les prestations de filles sont toujours monnayées dans ce genre de soirées. Les deux escort girls affirment avoir perçu pour ce voyage de trois jours 2 500 euros.
Aurélie D. était également dans la chambre de Marie-Anne ce soir-là. Durant ses auditions du 14 novembre 2011, par les policiers français, et celles du 6 décembre par les enquêteurs belges, la jeune femme a tenté de dédramatiser la situation.
Dans son procès-verbal, on pouvait lire : « Je me souviens bien. Je voyais à sa tête que ça ne lui plaisait pas. J’ai dit à DSK d’arrêter. Je ne l’ai pas entendue dire non, si elle ne voulait pas et si elle avait crié je l’aurais entendue et je serais intervenue […]. Il est vrai que DSK aimait bien s’attaquer aux petites nouvelles. Il fallait lui dire un non très ferme et pas un non plaintif qui avait plutôt tendance à l’exciter ».
Durant sa comparution devant les juges lillois le 26 mars dernier,DSK a affirmé : « aucune des relations sexuelles que j’ai pu avoir […] autour du groupe d’amis de Fabrice Paszkowski ne m’est apparue comme étant tarifée ». « Il n’y a eu aucun rapport brutal, aucune vision dégradée de la femme et aucune violence », a-t-il renchéri.
Malgré son démenti et bien que Marie-Anne n’ait pas voulu saisir la justice sur cette affaire, les trois juges ont tout de même décidé de creuser cette nouvelle piste. Le parquet fera part de sa décision très prochainement si le réquisitoire supplétif déposé a sa raison d’être ou non.