L’ancien Haut commissaire aux solidarités actives Martin Hirsch, qui a lancé en 2009 le Revenu de solidarité active (RSA), dit craindre une " entourloupe " sur l’utilisation des crédits destinés au financement du RSA. Ses déclarations à ce sujet tenues hier matin sur le plateau de France Info ont provoqué la colère du gouvernement.
"Il ne faut pas se laisser faire par les entourloupes", dit-il, fustigeant "ceux qui veulent faire leur carrière sur le dos des pauvres". "On a créé une taxe pour financer le RSA, pour faire en sorte que les gens qui travaillent aient un complément de revenu. Elle rapporte 1,5 milliard et un milliard est mis de côté", explique-t-il, soupçonnant qu’"on utilise l’argent qui doit aller dans la poche des travailleurs modestes pour autre chose".
La déclaration choc du père du RSA intervient alors que le parti majoritaire UMP entreprend de
faire travailler une partie des bénéficiaires du RSA pendant cinq heures par semaine, soit sur la base horaire du Smic, sans quoi leur allocation "
serait diminuée". Le projet concerne environ 650 000 foyers bénéficiaires du RSA, à qui un Contrat Unique d’Insertion (CUI) sera proposé par les collectivités locales. Ce durcissement des conditions d’obtention du RSA a été largement évoqué mercredi 8 juin lors de la convention UMP sur la justice sociale à l’Assemblée nationale.
Lors de son intervention sur France Info, Martin Hirsch s’inquiète qu’on " détourne " l’excédent d’un milliard enregistré par le dispositif de financement du RSA à d’autres fins. "Il faut les remettre dans la poche des gens modestes qui travaillent ", insiste-t-il. Et d’ajouter : "Cela me mettrait mal au cœur qu’on utilise l’argent des travailleurs modestes pour alléger l’ISF (Impôt de Solidarité sur la Fortune)".
Les propos de l’ancien Haut commissaire aux solidarités actives ont agacé le gouvernement, et son porte-parole François Baroin l’a fait savoir dès la sortie du Conseil des ministres hier en fin de matinée. "Martin Hirsch dit des sottises", vocifère le ministre du Budget, estimant que le fondateur du RSA "commet une erreur en alignant des contre-vérités." " Si M. Hirsch a une histoire personnelle et a été un acteur majeur de la mise en œuvre de ce RSA, il n’en est pas propriétaire. Cela ne l’autorise pas à dire n’importe quoi, n’importe comment, dans n’importe quelle circonstance ", s’insurge François Baroin.
Hormis l’ire du gouvernement, les déclarations de Martin Hirsch ont été favorablement accueillies à gauche. Le porte-parole des députés PCF Roland Muzeau "crie au scandale" et demande des explications au gouvernement. " C’est un scandale sans nom ! Le chef de l’Etat et son Premier ministre doivent, sans délai, s’expliquer et rendre l’argent qu’ils volent aux plus modestes ! ", lance-t-il.
De son côté, François Hollande, candidat à la primaire PS, estime que " Martin Hirsch a raison ". " Il y a eu des dispositions fiscales qui ont été prises pour financer le RSA, notamment la reprise d’activité. Et que constate-t-on ? Finalement, comme il y a eu peu de reprises d’activité liées au RSA, cette ressource a été utilisée à d’autres fins ", regrette-t-il.