Mariée et mère de famille, elle a vu sa vie basculer avec les changements de comportement de son conjoint. Prise dans l’engrenage de la radicalisation islamiste, elle a vécu un cauchemar au quotidien... Un témoignage exclusif Antenne Réunion.
"Au fur et à mesure, il a commencé à me couvrir de plus en plus, jusqu’au port du voile intégral. Je l’ai fait parce qu’à cette époque, il avait pas mal d’amis qui partaient en Arabie Saoudite et dans d’autres pays islamiques et j’avais peur qu’il prenne les enfants pour partir avec eux si je ne faisais pas ce qu’il me disait" explique cette mère de famille en détaillant les changements de comportements de son ex-mari.
Marie (prénom d’emprunt) a pris conscience de la radicalisation de son mari à travers de nombreux changements. "Ça m’a fait ’tilt’ lorsque j’ai vu qu’il allait cinq fois par jour à la mosquée, qu’il ne s’habillait plus comme avant... Et surtout, les gens que l’on fréquentaient ici même à La Réunion avaient des maisons compartimentées. Il y avait un espace hommes et un espace femmes et les femmes ne pouvaient élever la voix en public. Donc les femmes étaient reléguées à la cuisine ou dans les chambres tandis que les hommes étaient au salon. C’était un petit peu déguisé, les choses étaient amenées au fil du temps... Il avait par exemple interdit le ketchup : parce que dans le ketchup, il y a du vinaigre et dans le vinaigre, il y a de l’alcool...".
"J’étais une femme active et je me suis retrouvée très vite enfermée chez moi et on me disait ’Tu es un bijou dans un écrin et pour ne pas que tu t’abîmes, il faut un joli écrin. Quand j’étais chez moi : mon écrin, c’était les murs de ma maison. Quand j’étais dehors, il fallait que je porte le voile intégral".
"On lui a proposé d’épouser l’Islam d’une manière poétique, belle... Comme si il allait retrouver une famille, des frères... Et pour le coup, c’était très attrayant".
"Il a rencontré des Frères musulmans qui suivaient le mouvement salafiste. Il s’est lié d’amitié avec ce groupe de personnes et au fur à mesure : son comportement, sa manière de penser ont changé...".
"Il ne parlait plus aux femmes et de mon côté, je n’avais plus le droit de parler aux hommes".
"A l’époque, je travaillais dans un milieu mixte et complètement laïque : il a fallu que j’arrête de travailler parce que selon les principes du mouvement salafiste, les femmes n’ont pas le droit de travailler dans un milieu où il y a des hommes. Elles doivent travailler dans un milieu où il n’y a que des femmes musulmanes : autant dire, nulle part".
"Il fallait tout accepter comme un enfant croit au Père Noël. J’avais essayé de lire le Coran et de lui dire qu’il y avait de contradictions avec ce que l’on vivait... Et là, le ton montait et on n’avait pas le droit de s’exprimer"...
Cette mère de famille a eu un déclic : son fils lui a ramené un dessin de l’école. La consigne était de dessiner sa famille. "Il devait dessiner sa maman et lui : il s’est mis avec des vêtements colorés et moi, il m’a dessiné avec le visage tout noir, les cheveux tout noir, la robe toute noire, les mains toutes noires...Je n’avais pas du tout envie que mon fils ait cette image de moi".
Frappée violemment au visage, cette mère de famille a réussi à se séparer de son mari. L’homme a eu l’interdiction de s’approcher du domicile familial.
"Si j’ai un message à faire passer : ce serait d’être vigilant aux petits signes qui entraînent les uns et les autres - et souvent les personnes les plus fragiles - vers la radicalisation".
Aujourd’hui séparée, elle garde une crainte : celle de voir revenir à La Réunion son ex-mari installé aujourd’hui dans un pays islamiste.