L’alliance des conservateurs et libéraux-démocrates à la tête de la Grande-Bretagne est plutôt une bonne nouvelle pour l’Union européenne, qui espère que l’europhilie des seconds neutralisera les velléités des premiers d’en découdre avec Bruxelles.
BRUXELLES (AFP) - L’alliance des conservateurs et libéraux-démocrates à la tête de la Grande-Bretagne est plutôt une bonne nouvelle pour l’Union européenne, qui espère que l’europhilie des seconds neutralisera les velléités des premiers d’en découdre avec Bruxelles.
"C’est le meilleur résultat possible pour l’UE car David Cameron n’aura pas les mains liées par les eurosceptiques radicaux de son parti", estime Hugo Brady, analyste au Center for European Reform.
Le chef des Tories, Premier ministre depuis mardi, risque en effet de devoir atténuer ses promesses de campagne, exposées en novembre dernier.
Il avait alors promis une renégociation assez importante de la relation entre son pays et l’UE, pour demander par exemple une exemption totale de l’application de la Charte européenne des droits fondamentaux, qui regroupe l’ensemble des droits civiques, politiques, économiques et sociaux des citoyens européens.
M. Cameron veut aussi rapatrier à Londres des prérogatives confiées à l’UE en matière de justice pénale, de coopération judiciaire, ou de politique sociale.
Flanqués des Libéraux-démocrates de Nick Clegg, "les conservateurs ne vont plus pouvoir poursuivre comme prévu leur programme", juge Hugo Brady.
Il s’attend à des "confrontations entre l’euroscepticisme absolu du nouveau ministre des Affaires étrangères, le conservateur William Hague, et les vues des Libéraux-démocrates qui sont le parti le plus europhile de Grande-Bretagne".
Premier signal donné mercredi : la coalition s’est engagée à ne pas adopter l’euro, ce qui dans le contexte actuel ne constitue pas une surprise.
Nick Clegg reste le favori de Bruxelles. Personne n’a oublié que ce polyglotte est passé dans les années 1990 par la Commission européenne, comme conseiller de Leon Brittan, puis fut député européen de 1999 à 2004.
Toutefois, cet attelage n’empêchera pas les conflits, en commençant par celui - traditionnel - sur le prochain budget de l’UE à partir de 2014, dont la négociation doit entrer l’an prochain dans le vif du sujet.
Les libéraux-démocrates sont des adversaires encore plus farouches des subventions agricoles de la PAC que les Tories. Londres plaidera non seulement pour le maintien de son "rabais" mais aussi pour une réorientation majeure des fonds vers des projets à ses yeux d’avenir, alors que Paris promet une "crise en Europe" si l’on touche trop à l’agriculture.
Les tractations sur un renforcement de la régulation du secteur financier s’annoncent aussi compliquées avec le nouveau gouvernement, soucieux de protéger les intérêts de la City de Londres même si la coalition veut mettre en place une taxe sur les banques.
Dans l’immédiat toutefois, la présence des libéraux-démocrates devrait éviter un clash avec Bruxelles.
"J’ai rencontré David Cameron plusieurs fois (...) et je suis sûr que nous aurons une bonne relation de travail, donc je ne suis pas inquiet" a dit mercredi le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, estimant que les grands défis actuels dans le monde nécessitaient une "réponse commune" de l’Europe.
Le ministre des Affaires étrangères Bernard Kouchner a lui aussi lancé un appel du pied à Londres, souhaitant coopérer en vue d’un renforcement de la "capacité collective de l’Europe".
Dès avant les élections, le président Nicolas Sarkozy s’était voulu serein. "Si Cameron gagne, il fera comme les autres. Il commencera anti-européen et il finira pro-européen. C’est la règle", a-t-il dit, cité par des parlementaires de son parti.