Le Premier ministre conservateur David Cameron et son numéro deux libéral Nick Clegg partagent le même passé doré mais leurs oppositions sur des dossiers cruciaux, comme l’Europe, pourraient menacer la première coalition britannique depuis la Seconde Guerre mondiale.
LONDRES (AFP) - Le Premier ministre conservateur David Cameron et son numéro deux libéral Nick Clegg partagent le même passé doré mais leurs oppositions sur des dossiers cruciaux, comme l’Europe, pourraient menacer la première coalition britannique depuis la Seconde Guerre mondiale.
Ils ont tous deux le même âge, 43 ans, et du sang bleu : la grand-mère paternelle de Nick Clegg était une aristocrate ayant fui la Russie après l’abdication du tsar en 1917. David Cameron descend du roi Guillaume IV (1830-1837).
Ils ont usé les mêmes bancs d’"Oxbridge" (contraction des prestigieuses universités d’Oxford et Cambridge) : Cameron a choisi Oxford, Clegg a préféré Cambridge.
La convergence de ces routes a pu faire douter du discours anticonformiste de Nick Clegg, qui se targue d’être le chantre d’une "nouvelle" politique, rompant avec le moule dominant. Si Cameron est un "aristo", Clegg est un "Cameron lite" (Cameron allégé), a-t-on pu entendre.
Le Tory a suivi l’école préparatoire fréquentée par les princes Andrew et Edward, puis le prestigieux collège privé d’Eton. Le libéral-démocrate, fils d’un riche banquier de la City londonienne, est allé à l’école de Westminster de Londres, à l’aura comparable à Eton.
Les deux hommes sont également bien mariés : Samantha Cameron est la fille d’un baron, Miriam Gonzalez Durántez, l’épouse espagnole de Nick Clegg, est une avocate internationale de haut vol.
"S’ils se rencontraient lors d’un dîner, ils s’entendraient bien", relève le Guardian.
Mais la comparaison s’arrête là : en politique, Clegg et Cameron s’opposent sur de nombreux points. Il y a un "gouffre en termes de valeurs entre moi et David Cameron", a assuré Nick Clegg. Avant de devenir son adjoint.
C’est sur le terrain de l’Europe que l’opposition est la plus flagrante.
Face à l’euroscepticisme des Tories, Nick Clegg oppose une europhilie quasi-génétique : né d’une mère néerlandaise et d’un père à moitié russe, il a épousé une Espagnole et parle couramment néerlandais, allemand, français et espagnol, en plus de l’anglais. C’est à la commission européenne qu’il a entamé sa carrière, en tant que conseiller, avant d’être député européen de 1999 à 2004.
Nick Clegg "cède à tout ce qui vient de Bruxelles", en avait conclu David Cameron dans une des nombreuses piques que se sont lancées les deux hommes lors des débats télévisés de la campagne pour les élections du 6 mai.
Opposés au traité européen de Lisbonne, les conservateurs promettent aux Britanniques un référendum pour tout nouveau transfert de pouvoir à Bruxelles.
Campés sur cet euroscepticisme dont ils avaient fait une ligne rouge, les Tories ont réussi à imposer aux Lib Dems qu’ils renoncent à leur ambition d’abandonner la livre au profit de l’euro, au moins durant cette nouvelle législature. Une concession qui pourrait faire grincer des dents parmi la base libérale-démocrate.
Sur l’immigration également, les Tories ont réussi à imposer leurs vues : Clegg voulait une régularisation des clandestins mais il a finalement accepté de soutenir le plafonnement de l’immigration voulu par Cameron.
Mais aussi fragile que semble le couple Cameron-Clegg, leur mariage de raison à la tête de la première coalition gouvernementale britannique depuis la Seconde guerre mondiale, les contraint à s’entendre.
Lors de la première conférence de presse conjointe des deux hommes, mercredi dans les jardins de Downing Street, David Cameron a cependant reconnu que les joutes du passé pourraient revenir à la face des deux hommes comme un boomerang. "On va nous renvoyer des choses qu’on a dites", a-t-il reconnu dans un rire embarrassé, interrogé pour savoir s’il regrettait d’avoir dit que "Nick Clegg" était sa blague politique préférée.
