La France et l’Allemagne ont douché mardi les ambitions de la Commissaire au Climat Connie Hedegaard, partisane de porter unilatéralement à 30% la réduction des émissions de gaz à effet de serre en 2020, en lui rappelant les conditions de l’offre de l’Union européenne.
BRUXELLES (AFP) - La France et l’Allemagne ont douché mardi les ambitions de la Commissaire au Climat Connie Hedegaard, partisane de porter unilatéralement à 30% la réduction des émissions de gaz à effet de serre en 2020, en lui rappelant les conditions de l’offre de l’Union européenne.
Le rappel a l’ordre a été formulé conjointement par le ministre allemand de l’Economie Rainer Brüderle et le ministre français de l’Industrie Christian Estrosi au cours d’un point de presse spécialement organisé à Bruxelles à la veille de la présentation de la communication de Mme Hedegaard dont l’AFP à obtenu une copie.
"Nous avons partagé nos inquiétudes sur la proposition de la Commission de passer d’un engagement unilatéral de réduction des émissions de gaz à effet de serre de 20 à 30%", a expliqué M. Estrosi.
"L’Union européenne est prête à porter son effort à 30% si les autres économies majeures prennent des engagements comparables (...) L’offre conditionnelle demeure", a insisté le ministre français.
"Nous avons la même analyse. Nous sommes d’avis qu’après l’échec du sommet de Copenhague, nous devons nous laisser un peu plus de temps pour les processus d’adaptation", a souligné M. Brüderle.
Les patrons européens sont sur la même ligne. Leur représentation à Bruxelles, Business Europe, a adressé mardi une lettre en ce sens au président de la Commission José Manuel Barroso.
Dans sa communication, Mme Hedegaard plaide en faveur de la hausse unilatérale de l’objectif de réduction à 30% au motif que le surcoût serait minime —11 milliards d’euros— et que la menace de délocalisations industrielles est limitée.
La Commission est en outre convaincue que cette décision de l’UE serait un incitatif pour la Chine et l’Inde, réticents à l’idée d’accepter un traité international contraignant sur le climat.
Les industriels européens ne sont pas d’accord et sont partis en guerre contre Connie Hedegaard.
"Il est impossible pour le secteur manufacturier de réaliser une réduction de 30% en 2020 sans réduction de ses activités et sans supprimer de très nombreux emplois", a averti Eurofer, l’Association européenne de la sidérurgie.
Les secteurs industriels couverts par le marché européen du carbone (ETS), seraient contraints de réduire de 34% leurs émissions par rapport à leurs niveaux de 2005, contre 21% dans le cadre d’une réduction de 20%.
Une réduction de 30% aurait également un impact conséquent pour les autres secteurs, notamment les transports, le bâtiment et l’agriculture qui produisent 50% des 2,2 milliards de tonnes de CO2 émises chaque année dans l’UE.
Or l’effort de réduction des émissions de ces secteurs se fait dans le cadre de plans nationaux, sous la responsabilité des gouvernements.
"Je trouve que c’est raisonnable de faire une pause", a plaidé M. Brüderle. "Dans des temps difficiles, il faut se fixer des priorités", a-t-il expliqué.
Concernant la mise en place d’un mécanisme de protection aux frontières, l’exécutif bruxellois a considérablement remanié son document de travail initial où il jugeait "inutile" cette demande du président français Nicolas Sarkozy et du chef du gouvernement italien Silvio Berlusconi. Il ne rejette plus catégoriquement ce mécanisme mais demeure néanmoins circonspect sur une telle mesure dans son document final.
La communication présentée mercredi par Mme Hedegaard sera discutée par les ministres de l’Environnement de l’UE le 11 juin à Luxembourg et des conclusions devraient être préparées pour le sommet européen organisé les 17 et 18 juin à Bruxelles.