Un membre de la branche maghrébine d’Al Qaïda (Aqmi) a livré un témoignage troublant sur les circonstances de la mort d’un des deux otages français tués il y a un an au Niger. Libération revient sur cette affaire dans son numéro du jour.
Libération rapporte dans son édition datée de ce vendredi le témoignage d’un membre d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) recueilli le 30 novembre dans une prison de la capitale mauritanienne Nouakchott. Mohamed al-Amine ould Mohamedou ould M’Balle, alias Mouawiya, n’a pas participé à l’enlèvement d’Antoine de Léocour et Vincent Delory mais en a entendu le récit fait par des commandos djihadistes qui ont survécu à l’attaque des forces spéciales françaises lors de l’opération de libération des deux jeunes Français.
Dans son témoignage que l’on peut qualifier de seconde main, le membre d’Aqmi cité par Libération a expliqué au juge anti-terroriste français Yves Jannier les circonstances dans lesquelles les deux otages français ont été tués.
Le jeune homme de 22 ans qui était entendu pour une tentative d’attaque contre l’ambassade de France en février 2011 a raconté que l’un des ravisseurs, surnommé Fayçal al-Jazaïri, avait abattu Antoine de Léocour de plusieurs balles de kalachnikov parce qu’il le retardait dans sa fuite à pieds dans le désert, juste après l’intervention des commandos français. Il a aussi assuré que Vincent Delory a péri brûlé dans le 4x4 qui transportait de l’essence à la suite des tirs à l’arme à feu. D’après ses témoignages totalement basés sur le ouï-dire, les commandos djihadistes ont assuré qu’ils n’ont pas exécuté ce deuxième otage.
Libération s’est également procuré le PV de l’audition du commandant du Commandement des opérations spéciales (COS), le général Frédéric Beth. L’officier français qui était entendu comme témoin, le 16 décembre, aurait livré peu de détails sur les circonstances dans lesquelles le 4x4 qui transportait les deux otages français a pris feu.
La famille de Vincent Delory, celui dont le corps a été retrouvé carbonisé, accuse les forces françaises d’avoir ouvert le feu sur le véhicule dans lequel il se trouvait, provoquant l’explosion de l’essence à bord.
Un fait troublant : la vidéo de l’opération, tournée depuis un avion, a été amputée d’une minute : il manque la séquence au cours de laquelle le 4x4 prend feu. Le ministre français de la Défense, Alain Juppé, précise dans une lettre au juge datée du 9 décembre que cette coupe relève d’un secret défense. En clair, elle a pour but de « ne pas révéler certains détails opérationnels ».
Antoine de Léocour et Vincent Delory, tous deux âgés de 25 ans, avaient été enlevés par des hommes armés dans la nuit de vendredi 7 à samedi 8 janvier 2011 alors qu’ils dînaient ensemble dans un restaurant - Le Toulousain – dans le centre-ville de Niamey, au Niger. Les deux Français enlevés ont été emportés par leurs ravisseurs à bord d’un 4x4. S’ensuivirent une course-poursuite et l’intervention des forces spéciales françaises avec l’appui des commandos nigériens. De sources officielles émanant du Niger et de la France, les deux jeunes hommes ont été exécutés par leurs ravisseurs et ne sont pas morts sous les balles des militaires.