Le parti du Premier ministre éthiopien Meles Zenawi a organisé mardi une démonstration de force en mobilisant des dizaines de milliers de manifestants après sa victoire écrasante aux législatives, dénoncée pour fraude par l’opposition.
ADDIS ABEBA (AFP) - Le parti du Premier ministre éthiopien Meles Zenawi a organisé mardi une démonstration de force en mobilisant des dizaines de milliers de manifestants après sa victoire écrasante aux législatives, dénoncée pour fraude par l’opposition.
Ces législatives ont souffert d’un manque de liberté politique et d’un "déséquilibre" de moyens pendant la campagne, a estimé mardi la mission d’observation de l’Union européenne dans un rapport préliminaire.
Au pouvoir depuis 1991, l’EPRDF (Front révolutionnaire et démocratique des peuples éthiopiens) a laminé l’opposition, y compris dans les bastions de cette dernière à Addis Abeba et dans la région de l’Oromo (centre), selon des chiffres encore partiels annoncés lundi soir par la commission électorale.
Le parti au pouvoir a remporté au moins 20 des 23 circonscriptions en jeu dans la capitale, où l’opposition était arrivée en tête au précédent scrutin il y a cinq ans.
Dans l’Oromo, où vit la principale ethnie du pays — 25% des 80 millions d’Ethiopiens —, le parti au pouvoir a obtenu 3.927.673 voix contre 117.790 pour son adversaire du Medrek.
Le taux de participation a atteint un niveau record de plus de 90 pc, toujours selon la même source.
"Je ne vois aucune raison d’accepter les résultats qui sont complètement frauduleux", a réagi un des principaux dirigeants de l’opposition, Merara Gudina, interrogé mardi par l’AFP.
Selon lui le parti au pouvoir "a pris le contrôle de tous les aspects de l’administration des élections, y compris le décompte des voix".
Les responsables des huit partis d’opposition qui forment le Medrek (Forum pour la démocratie et le dialogue) se réunissaient ce mardi pour décider d’une position commune.
Les observateurs de l’Union européenne et ceux de l’Union africaine, autorisés par le pouvoir à suivre le scrutin après avoir accepté un code de conduite contraignant, vont rendre ce mardi leur verdict sur l’équité et la transparence du vote.
L’opposition avait contesté le décompte des résultats du scrutin de 2005, qui lui avait permis d’obtenir le meilleur score de son histoire sans toutefois prendre le dessus sur l’EPRDF. Ses critiques avaient été relayées par la mission d’observation de l’UE de l’époque, mais la repression par les forces de l’ordre des manifestations avaient fait environ 200 morts, selon le rapport officiel d’une commission parlementaire.
Des dizaines de milliers de partisans du pouvoir ont envahi mardi matin l’immense place de Meskal Square, au coeur d’Addis Abeba, pour signifier que le résultat du scrutin ne souffrait à leurs yeux d’aucune contestation.
"Oui aux observateurs électoraux ! Non aux chevaux de Troie !", Nous avons choisi nos dirigeants, acceptez les résultats !", pouvait-on lire sur les affiches rédigées en anglais.
Selon des témoignages recueillis par l’AFP, les membres et partisans de l’EPRDF ont battu le rappel en vue de cette manifestation depuis lundi soir en allant de maison en maison.
La radio nationale a également prévenu ses auditeurs, et développé en longueur des critiques contre les observateurs étrangers des législatives de dimanche, notamment le rapport de Human Rights Watch (HRW) qui a dénoncé des intimidations.
Selon la télévision nationale, des rassemblements sont aussi organisés dans les grandes villes de province comme Bahir Dar, où des milliers de personnes sont rassemblées dans le stade brandissant des fanions de l’EPRDF.
Selon un témoin contacté à Bahir Dar par l’AFP par téléphone, "les collèges et les lycées sont fermés pour permettre aux jeunes de participer au rassemblement".
L’organisation américaine HRW a accusé lundi le gouvernement éthiopien d’avoir "fait pression, intimidé et menacé les électeurs éthiopiens". Le gouvernement a fermement démenti ces accusations, affirmant que HRW "menait une campagne de dénigrement pour des raisons idéologiques".