1320 décès et quelque 3100 hospitalisations pour insuffisance des valves cardiaques seraient liés à la prise de Médiator entre 1976 et 2009 en France. Ces chiffres émanent d’une étude de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) publiée jeudi et rapportée par Le Monde.
Entre 1976, année à laquelle Médiator a été lancé sur le marché des médicaments et 2009, année du retrait, l’Inserm a recensé 1320 décès et 3100 hospitalisations pouvant être attribués à la prise de benfluorex (Mediator).
En 33 ans, 145 millions de boîtes de Médiator de 30 comprimés chacune ont été vendues à près de 5 millions de patients. « Mais on ne sait pas exactement comment », note le docteur Mahmoud Zureik qui, avec le docteur Agnès Fournier, a établi ces calculs pour l’Inserm. Les deux épidémiologistes ont focalisé leur recherche sur les demandes de remboursements faites par les patients prescrits au Médiator ainsi que sur les ventes réalisées par le laboratoire Servier. « Nous avons affiné nos calculs en travaillant sur les données disponibles, qui dans le cas de celles émanant de l’assurance-maladie ne permettent pas de remonter plus loin que l’année 2006 », précise encore le médecin.
Les auteurs de cette étude ont également évalué à 78 millions (sur les 145 millions écoulées) le nombre de boîtes de Médiator vendues à des gros consommateurs, c’est-à-dire ceux qui ont déjà ingérés jusqu’à 900 comprimés. « C’est parmi cette population de gros consommateurs qu’il est le plus probable de retrouver ceux ayant présenté des effets indésirables sérieux, une insuffisance valvulaire modérée à grave, et à avoir été hospitalisés pour cette raison », poursuit le Dr Zureik. Cette nouvelle piste s’est avérée intéressante pour les deux médecins après qu’une étude française ait démontré que la prise de ce médicament multipliait par 3,1 le risque de valvulopathie chez les patients.
« Nous avons fait des estimations volontairement conservatrices car nous n’avons pas pris en compte des décès pouvant survenir sans que le patient ait été hospitalisé, pas plus que les effets secondaires chez des patients ayant pris du benfluorex mais ayant arrêté de le faire avant 2006. De même, nous n’avons pas pris en considération un autre effet secondaire potentiellement mortel connu de la famille des fenfluramines à laquelle appartient le benfluorex, l’hypertension artérielle pulmonaire primitive. Nos résultats sur le risque relatif d’atteinte des valves cardiaques et sur la mortalité pourraient donc sous-estimer la réalité », conclut Mahmoud Zureik dans ce rapport.
Ce document est publié à quelques mois seulement du premier procès sur l’affaire Médiator, prévu le 14 mai au tribunal correctionnel de Nanterre. Les avocats de la partie civile ne manqueront probablement pas de s’y référer au détriment du laboratoire Servier.