Des téléphones portables d’urgence sont mis à la disposition de femmes victimes de violences conjugales. Un dispositif, testé en France métropolitaine, jugé intéressant mais insuffisant selon les associations de lutte contre les violences conjugales.
Des téléphones portables sont mis à la disposition de femmes victimes de violences. Le dispositif existe depuis 2009 en Seine-Saint-Denis et vient d’être lancé à Paris. Il pourrait bientôt s’étendre sur toute la France.
Le principe est simple : en appuyant sur l’une des touches du portable, la victime prévient un interlocuteur d’une plateforme d’assistance. Ce dernier évalue le danger et averti la police s’il le juge nécessaire.
Depuis sa mise en place en Seine-Saint-Denis, 737 appels ont déjà été passés. 50 ont débouché sur une intervention des forces de l’ordre. Les téléphones sont attribués pour une durée de six mois, renouvelable une fois. A Paris, c’est la Parquet qui délivre aux femmes "en très grand danger" des téléphones dits "d’alerte".
Marie a connu une vie de femme battue et pour elle le dispositif pourrait servir mais elle émet toutefois des réserves. Elle a vécu 15 ans avec son compagnon jusqu’à ce qu’une dispute éclate un soir sous les yeux de son fils. Le lendemain, elle porte plainte. C’est après le divorce qu’elle est harcelée par son ancien compagnon qui l’a suivait. Elle a même reçu des menaces de mort. Violentée par son ex-compagnon, elle explique que "peut-être dans ma situation à moi, ça m’aurait servi à éviter des menaces de mort".
Néanmoins, Marie reste persuadée que le dispositif ne règlera pas le problème des femmes battues. Elle raconte que "quand il (son compagnon) a essayé de m’étrangler, je n’ai pas eu le temps d’avoir un seul réflexe. Je ne pense pas que le téléphone aurait pu changer quoi que ce soit. Ca dépend de la situation, s’il y a quelqu’un avec elle, il pourrait téléphoner. Mais je ne pense pas que les personnes en danger auront le réflexe ou bien le temps de prendre le téléphone". Pour elle c’est la mentalité des hommes qu’il faut changer et assurer un suivi médical des hommes violents.
Pour les associations qui luttent contre les violences faites aux femmes, si le dispositif est salué, elles estiment que ce n’est pas non plus une solution miracle pour venir en aide durablement aux femmes violentées.
Odette Poncet, présidente de l’association Femmes Solidaires estime que "ce n’est pas le meilleur moyen. C’est un moyen qui peut toujours protéger certaines femmes évidemment. Il faudrait que les femmes soient mises à l’abri et il faudrait qu’on puisse s’occuper de ces hommes avec la création de centres de soins pour hommes violents". Mais selon elle, il faudrait surtout "des moyens et des volontés".
Le dispositif peut être un moyen de dissuasion mais pour Odette Poncet, "ce n’est pas la solution à tout. C’est un des moyens (de lutte) certainement puisqu’il est personnalisé et il accompagne la personne en danger". Néanmoins le dispositif vaut le coup d’être testé et "ce serait très intéressant que ce soit implanté à la Réunion".
Thérèse Baillif, présidente de l’association CEVIF - Collectif pour l’élimination des violences intra-familiales - cette expérimentation comporte des points positifs. "La femme qui est victime de violence, qui est harcelée et qui a peur que son concubin la surprenne, qu’elle puisse vraiment appeler et se sentir plus en sécurité. Mais en même temps, c’est un dispositif parmi bien d’autres qui devront être mis en place".
Les violences conjugales sont un véritable fléau à La Réunion et ce système allié à d’autres dispositifs pourraient aider les femmes violentées à trouver une porte de sortie pour une vie meilleure. Selon l’Insee, les violences conjugales sont en augmentation. Il est néanmoins difficile de chiffrer précisément le nombre de cas car peu de femmes violentées portent plainte. Près de cinq plaintes par jour sont toutefois enregistrées dans le département.