Les femmes de pêcheurs ont décidé de se mobiliser et lancer un appel aux autorités pour des réflexions autour de deux leviers économiques : prix des appâts et des poissons.
Le communiqué des femmes de pêcheurs de La Réunion
Les pêcheurs artisans réunionnais ont à plusieurs reprises tiré la sonnette d’alarme sur la dégradation de leurs conditions de vie. Force est de constater qu’ils n’ont pas été entendus. Nous, Collectif de Femmes de Pêcheurs lançons aujourd’hui un appel à l’aide.
Des conditions de vie qui deviennent insupportables
- Revenus.
Il y a quelques années, une famille de pêcheur réunionnais arrivait tant bien que mal à s’en sortir. Nous avons investi dans notre outil de travail : des bateaux. Nous avons investi dans nos maisons et nous avons, comme beaucoup de gens, contracté des prêts. Aujourd’hui une fois payées les charges sociales, les appâts et les traites du bateau, on ne peut plus se verser de salaire, plus payer nos traites et nos dettes s’accumulent.
- Famille
Évidemment cette situation a des impacts profonds sur nos cellules familiales. Nos familles sont dans la détresse et cela a des conséquences sur notre moral, notre quotidien, nos enfants. Nous sommes des épouses, des mères et nous ne pouvons plus tolérer cette situation. Nous demandons à être entendues et à ce que les conditions soient enfin réunies pour que nos époux puissent vivre de leur travail et que nos familles vivre dans la dignité.
Les raisons de cette dégradation de nos conditions de vie
Elles sont nombreuses mais nous souhaitons nous concentrer aujourd’hui sur l’essentiel : le prix des appâts et le prix des poissons
Le prix des appâts
- le prix des appâts n’a cessé d’augmenter ces dernières années. La prochaine augmentation prévue aura lieu en fin d’année. Le prix des appâts va passer de 3,20€ à 4,20€/Kg. Le cours mondial des appâts ne cesse d’augmenter mais le phénomène est accentué à la Réunion. Le prix des appâts n’est pas le même pour tous : Les pêcheurs qui acceptent de revendre leurs poissons aux usiniers ont la possibilité d’acheter leurs appâts à des prix bien plus avantageux. Mais le prix d’achat que l’on nous propose pour nos poissons à l’usine est alors bien inférieur à ce que l’on nous propose ailleurs. On ne peut donc pas s’en sortir.
Le prix des poissons
- C’est un fait ; on ne pêche pas autant de poisson qu’avant. Mais si le marché était régulé, nous rencontrerions certainement moins de difficulté. Alors que nos confrères métropolitains bénéficient de ventes à la « criée », qui régulent le prix du poisson par rapport à l’offre et à la demande, les DOM eux connaissent un prix du poisson constant toute l’année. Cette situation est injuste et incompréhensible.
- Les petits pêcheurs sont les derniers servis. Par exemple pour un espadon vendu aux alentours de 23 euros en poissonnerie, le pêcheur artisan ne va toucher entre 6 et 8 euros. La qualité de notre pêche n’est pas valorisé, aujourd’hui ont nous achète nos poissons frais pêchés il y a moins de 24 heures au même prix que les poissons de la pêche semi-industriels qui eux arrivent sur les marchés plus de 12 jours (et parfois beaucoup plus) après avoir été pêchés !
C’est toute une profession qui est dans l’attente de solutions
1- Aujourd’hui, nous, Collectif des Femmes de Pêcheurs, demandons à ce que l’on trouve des solutions pour agir sur ces deux leviers essentiels à la pérennité de notre activité et l’avenir de nos familles : Prix des appâts et Prix du poisson.
2- Nous demandons que la filière soit structurée de manière équitable autour de tous les segments de la pêche réunionnaise. Les petits pêcheurs se retrouvent aujourd’hui dépendant de décisions et d’actions menées par des acteurs qui sont à la foi juge et parti.
3- Des solutions sont possibles. Il s’agit juste que tout un secteur, et les instances qui le régulent, manifestent une REELLE volonté de sauver les pêcheurs artisans réunionnais.
➢ Nous souhaitons que tout soit fait pour que l’OPPAR (organisation des producteurs, portée par le Comité des Pêches) soit opérationnel au plus vite car c’est l’outil indispensable qui nous permettra de représenter les pêcheurs artisans et défendre les intérêts de nos maris.
➢ Nos maris accompagné du Comité des Pêches ont rencontré la Région Réunion et sont en train de monter des dossiers afin d’obtenir une aide exceptionnelle. Nous espérons que cette démarche aboutira
➢ Nous attirons également l’attention des pouvoirs publics sur les montant des charges supportées par les petits pêcheurs indépendants. Nous sommes aujourd’hui, au vu de nos revenus, dans l’impossibilité de les supporter. Leurs montants devraient être revus durablement et correspondre à la réalité d’un secteur sinistré. Nous soulignons que les armements de la pêche hauturière ont aujourd’hui des charges inférieures aux nôtres.
> Nous avons appris avec stupeur que la Caisse Chômage Intempérie ne serait pas reconduite l ‘année prochaine. Cette dernière ne couvrait même pas un tiers du nombre réel de jours d’intempérie, ce qui contribuait également à aggraver notre situation. Nous demandons donc à avoir des réponses précises sur ce point et la garantie d’un système de couverture plus efficace.
➢ Plus de transparence : lorsque l’on nous promet par voie de presse des aides exceptionnelles aux appâts nous aimerions en voir la couleur. Certains la touchent d’autres non ? Tout cela reste très opaque et nous laisse la désagréable impression de vouloir jouer sur des effets d’annonce.
Les pêcheurs artisans en ont assez d’être manipulés et d’être les dindons de la farce. Nous ne souhaitons pas vivre sous perfusion des aides d’état ou des aides européennes qui profitent de toute façon majoritairement aux usiniers et non aux producteurs. Des solutions doivent être trouvées à long terme pour garantir la pérennité de la profession de nos maris et l’avenir de nos familles !
Nous sommes persuadées que nous avons toute légitimité à (re)prendre une place qui a toujours été la nôtre, celle d’un artisanat de qualité, qui a fait partie du patrimoine de notre île et qui est la garantie de trouver sur nos étals un poisson frais, gage d’une qualité exceptionnelle pour les consommateurs réunionnais.
Les petits pêcheurs réunionnais sont passés de 500 à 160 en moins de 10 années et il faut stopper cette hémorragie. Nous nous battrons pour l’avenir de nos familles !
Le Collectif des Femmes de Pêcheurs de La Réunion est ouvert à toutes les bonnes volontés !