ll y a quelques jours, la candidate FN a mis le feu aux poudres en relançant un vif débat autour de l’accès à l’IVG. Marine Le Pen a affirmé qu’en cas de nécessité budgétaire, elle était prête à prendre la décision de ne plus rembourser ce qu’elle considère comme « des avortements de confort ». Alors que la classe politique s’agite sur le plan national, à la Réunion, cette question de société est également au coeur des discussions. Le nombre d’IVG pratiquées dans notre département est en effet bien supérieur à la moyenne nationale. Les professionnels de la santé tirent la sonnette d’alarme.
La bataille pour les présidentielles fait rage. Afin de se démarquer et obtenir l’adhésion des Français, les différents candidats assènent leurs promesses de campagne et se positionnent sur les dossiers les plus délicats.
C’est ainsi que jeudi, à l’occasion de la Journée de la femme, Marine Le Pen a soulevé la question de l’Interruption volontaire de grossesse, évoquant son intention de " mettre fin à des abus », à ce qu’elle considère comme des "avortements de confort". La Présidente du Front National a justifié sa position par ces propos : « Il y avait une femme sur dix il y a dix ans, il y en a deux sur dix aujourd’hui qui se servent de l’avortement comme d’un véritable moyen contraceptif » ( cf Linfo.re : La question du coût de l’IVG agite la classe politique).
Ces arguments ont provoqué un tollé au sein de la classe politique française. Nicolas Sarkozy s’est déclaré en « total désaccord » avec la candidate FN. Les deux candidats à la présidentielle Eva Joly (EELV) et Jean-Luc Mélenchon (Front de gauche) se sont dits favorables au remboursement intégral de l’intervention pour toutes les femmes. Le candidat socialiste François Hollande souhaite faciliter l’accès aux centres pratiquant l’IVG.
Cette polémique a ramené au centre des débats la question de la banalisation de l’IVG. A la Réunion, en 2010, 12% des IVG concernaient des mineures, selon les chiffres de l’Observatoire Régional de la Santé de la Réunion. Cette année là, 4177 interruptions de grossesses ont été enregistrées. Si le nombre d’IVG reste stable depuis 2002, on constate que le nombre de mineures ayant recours à cette pratique est en nette augmentation et que les chiffres de la Réunion restent bien supérieurs à ceux de la Métropole ( en 2007, on dénombrait en moyenne 25 IVG pour 1000 jeunes filles mineures à la Réunion, contre 12 pour 1000 dans l’hexagone).
Toujours selon l’enquête menée par l’ORS en 2011 (cf Linfo.re : 12% des IVG concernaient des mineures en 2010) , l’âge moyen des femmes ayant recours à l’IVG à la Réunion est de 26,5 ans, et varie de 12 à 49 ans. Plus de la moitié des femmes ayant recours à l’IVG appartiennent à la catégorie des 18-29 ans. En 2010, 25% des IVG pratiquées sur des mineures étaient des IVG tardives.
Interrogé pour Antenne Réunion radio, le Président de l’Union Régionale des Pharmaciens de la Réunion, Eric Cadet, ne parle ni de banalisation ni "d’acte de confort", mais tire la sonnette d’alarme. Le professionnel de santé explique : " Il y a une tranche de la population qui est réticente à parler de la contraception car elle pense que c’est une façon d’inciter les jeunes à passer à l’acte. Au contraire, il faut en parler pour éviter toutes ces interruptions de grossesses".
Les tabous ne facilitent pas les choses. C’est la raison pour laquelle Eric Cadet souligne l’importance d’améliorer la communication auprès du public et montre l’intérêt d’une plus grande mobilisation des acteurs de la santé. L’interruption de grossesse n’est pas un acte facile, un geste anodin. Le Président de l’Union Régionale des pharmaciens de la Réunion rappelle que bien souvent, les jeunes filles mineures qui ont recours à une IVG ont peur de leurs parents ou sont en manque de repères.
Ce constat illustre l’urgence de la situation. Interrogé pour Antenne Réunion radio, un gynécologue a accepté de livrer son témoignage. Le praticien voit régulièrement défiler dans son cabinet des jeunes filles âgées entre 14 et 17 ans et des femmes souhaitant avoir recours à une IVG. Le médecin confie qu’il procède en moyenne, à une dizaine d’IVG médicamenteuses et à une IVG chirurgicale par semaine.
Dans la vidéo jointe, le témoignage d’un gynécologue qui pratique régulièrement des IVG.