Alors que des milliers de candidats planchent actuellement sur les épreuves du baccalauréat 2011, Mostafa Fourar dévoile les chiffres de la Réunion à ce sujet. Après deux ans passés à la tête de l’Académie de la Réunion, le recteur se félicite des progrès réalisés avec 86% de taux de réussite au baccalauréat en 2010, ce qui positionne l’île comme étant la 14ème Académie de France, sur 30. Le premier représentant de l’Education Nationale sur le département a également abordé longuement la problématique de la violence scolaire.
Avant de revenir sur le baccalauréat 2011, retour sur le fait de la semaine : l’agression mortelle survenue à la sortie d’un collège dans l’Hérault, en métropole. La mort d’une adolescente âgée dec13 ans ce lundi 20 juin, après avoir été rouée de coups par un autre adolescent met en lumière la violence scolaire. Quelle est votre réaction face à ce drame ?
Mostafa Fourar : Il s’agit d’un drame inacceptable, insupportable. Il s’agit d’une jeune fille qui a été agressée par un jeune garçon qui lui a ôté la vie pour des raisons futiles. Deux familles sont aujourd’hui détruites et tout cela dans un collège réputé sans violence. Cela veut dire que la violence peut surgir n’importe où et comme l’a rappelé le ministre de l’Education Nationale qui s’est rendu sur le lieu du drame : la violence n’est pas le fruit de l’école, c’est le reflet de la société. C’est ce qui doit tous nous interpeller : communauté éducative et parents, nous devons nous mettre devant nos responsabilités.
Lors d’une situation comme celle-ci, qui est responsable des phénomènes de violence aux abords des établissements scolaires ?
Mostafa Fourar : Les responsables sont d’abord ceux qui commettent leurs gestes, chacun est responsable de ses gestes. En ce qui concerne le maintien de l’ordre à l’extérieur des établissements scolaires, cela relève de l’ordre public donc de la Police et de la Gendarmerie Nationale. Mais cela ne veut pas dire que la communauté éducative ne doit pas assumer ses responsabilités et c’est ce que nous faisons.
A la Réunion, ce phénomène est-il en augmentation ?
Mostafa Fourar : C’est sûr qu’aujourd’hui, on en parle de plus en plus dans les médias. Et lorsqu’un fait se produit au niveau national, on se pose la question par rapport à ce qui se passe à la Réunion. Je n’ai pas les chiffres exacts de tous les actes mais la difficulté aussi, c’est au niveau du classement. Nous recensons tous les actes.
Quels sont les moyens mis en place pour lutter contre la délinquance scolaire ?
Mostafa Fourar : Ils sont nombreux. Encore une fois, c’est de la responsabilité de tout le monde, de la communauté éducative mais également des parents. Les moyens que nous avons mis en place, ce sont des moyens en terme de formation. Nous sensibilisons nos enseignants, nos chefs d’établissements : dans le cadre de leur formation initiale mais également de la formation continue quant à la problématique de la violence à l’école. Nous avons également mis en place des dispositifs suite aux Etats Généraux sur la violence au niveau national. A cette occasion, il y a eu un certain nombre de recommandations et à la Réunion, nous avons établi un diagnostic de sécurité pour la plupart des établissements scolaires.
Nous avons également un référent sécurité par établissement : soit un policier, soit un gendarme. Et enfin, nous avons mis en place une équipe de sécurité mobile composée de neuf personnes. En un an, cette équipe a fait quatre interventions seulement et c’est tant mieux. Et d’ailleurs, j’en profite pour vraiment rendre hommage à cette équipe qui effectue un travail essentiel de prévention et de la lutte contre la violence scolaire. Ils ont enregistré des films avec des élèves et ils font ensuite des projections dans les classes en les faisant réagir afin qu’ils prennent conscience des risques des ces violences qui peuvent apparaître anodines quelques fois mais peuvent également se terminer par un drame.
Un constat : les jeunes s’envoient de plus en plus des messages de menaces par SMS et sur les réseaux sociaux. Des situations qui peuvent déraper à l’école avec des règlements de compte, quelles solutions pouvez-vous apporter ?
Mostafa Fourar : Il faut savoir que le drame qui a eu lieu en métropole et qui a abouti sur le décès d’une jeune fille, c’est aussi une utilisation de ces moyens puisque la soeur de l’agresseur se sentait menacée par des messages sur Internet. Dans le cadre éducatif, nous utilisons ces moyens de communication comme support et tous les enseignants sont sensibilisés à l’utilisation de ces supports internet et portable et à leurs risques. Mais je veux également faire appel aux parents : lorsque l’on offre un téléphone portable à son enfant ou lorsqu’il se trouve devant un ordinateur pour accéder à Internet, c’est une belle ouverture sur le monde, c’est du progrès mais cela comporte également des risques. Et il faut que les parents soient concernés et sachent également expliquer les dangers à leurs enfants.
Autre actualité : le baccalauréat 2011 a démarré la semaine dernière. Un autre constat : une augmentation des effectifs cette année de l’ordre de 17,5%. 11 241 candidats au baccalauréat en 2011 contre 9 570 en 2010. Et puis ce chiffre au baccalauréat professionnel : 1715 candidats de plus que l’an dernier. Comment expliquez-vous cette hausse ?
Mostafa Fourar : Cette année, c’est une conjoncture un peu particulière car nous avons mis en place le baccalauréat professionnel en trois ans au lieu de quatre ans. Et donc nous avons eu un chevauchement entre les deux baccalauréats, donc nous avons amené deux promotions pour les examens de cette année. Cela augmente les effectifs globaux.
Restons dans les chiffres : en 2009 et 2010 le taux de réussite du baccalauréat à la Réunion avoisinait les 86%, quel est l’objectif cette année ?
Mostafa Fourar : C’est bien sûr d’améliorer ce chiffre mais ce n’est pas là l’enjeu essentiel pour nous. Avec 86% de taux de réussite, cela nous a permis de dépasser le taux de réussite national pour la première fois en 2010. Ce qui nous a placé 14ème Académie de France sur 30 (...).
Quelle est le niveau des bacheliers réunionnais par rapport à celui de la métropole ? Le niveau de la Réunion est-il égal à celui de la Réunion ?
Mostafa Fourar : Bien sûr, il n’y a pas de doute là-dessus. Nous avons les mêmes professeurs - formés de la même manière - , les mêmes inspecteurs académiques, le même état d’esprit de travail. Il n’y a aucun doute sur le niveau du baccalauréat à la Réunion.
Le créole une spécificité à la Réunion, où en est-on dans la pédagogie de l’apprentissage du français à l’école ?
Mostafa Fourar : On a changé d’époque. Il fut une époque où effectivment l’enseignement du français se faisait sans tenir compte de l’origine et du milieu social des enfants. Nous savons que nous sommes dans un milieu "créolophone", cette préoccupation est prise en considération ces dernières années. En 2007, nous avions sept professeurs habilités bilingue, nous en sommes à 138 cette année. Toujours en 2007, il n’y avait aucune classe bilingue et quatre ans plus tard, il y en a 18.
Retrouvez l’intégralité de cet entretien avec le Recteur de l’Académie de la Réunion dans la vidéo ci-jointe.