A la Réunion comme partout sur le territoire français ce lundi 18 juin, des milliers de candidats planchent sur les sujets de l’épreuve de philosophie. Découvrez les sujets.
Découvrez et commentez les sujets de philosophie du baccalauréat 2012.
Cette année, les thèmes abordés dans les énoncés tournent autour du désir, du travail, de la liberté... Voici les deux premiers sujets proposés par filière.
Série L :
1er Sujet : Peut-on s’engager sans renoncer à sa liberté ?
2ème Sujet : Sait-on ce qu’on désire ?
3ème Sujet : Expliquer le texte suivant :
Chacun de nous a sa manière d’aimer et de haïr, et cet amour, cette haine, reflètent sa personnalité tout entière. Cependant le langage désigne ces états par les mêmes mots chez tous les hommes ; aussi n’a-t-il pu fixer que l’aspect objectif et impersonnel de l’amour, de la haine, et des mille sentiments qui agitent l’âme. Nous jugeons du talent d’un romancier à la puissance avec laquelle il tire du domaine public, où le langage les avait ainsi fait descendre, des sentiments et des idées auxquels il essaie de rendre, par une multiplicité de détails qui se juxtaposent, leur primitive et vivante individualité. Mais de même qu’on pourra intercaler indéfiniment des points entre deux positions d’un mobile sans jamais combler l’espace parcouru, ainsi, par cela seul que nous parlons, par cela seul que nous associons des idées les unes aux autres et que ces idées se juxtaposent au lieu de se pénétrer, nous échouons à traduire entièrement ce que notre âme ressent : la pensée demeure incommensurable avec le langage.
BERGSON, Essai sur les données immédiates de la conscience
Série S :
1er Sujet : Puis-je ne pas être moi-même ?
2e Sujet : Le travail peut-il être autre chose qu’un moyen de satisfaire des besoins ?
3e Sujet : Expliquez le texte suivant :
Quant à l’efficacité de la force et de la rigueur pour modifier les opinions des hommes, l’histoire est remplie d’exemples de leur essai ; mais à peine trouvera-t-on un cas où une opinion ait été éradiquée par les persécutions, sauf là où la violence qui s’est exercée à son encontre s’est employée en même temps à exterminer tous ceux qui la professaient. Je désire seulement que chacun consulte son propre coeur et qu’il en fasse l’expérience : la violence peut-elle contraindre les opinions ? Les arguments eux-mêmes, lorsqu’ils sont poussés avec trop de chaleur, ne nous rendent-ils pas encore plus obstinés dans nos opinions ? Les hommes sont en effet fort soucieux de préserver la liberté de cette partie d’eux-mêmes en quoi réside leur dignité d’hommes et qui, si on pouvait la contraindre, ferait d’eux des créatures très peu différentes des bêtes brutes. Je pose la question à ceux qui, récemment, ont eux-mêmes résisté avec constance à l’emploi d’une force qui s’est révélée sans efficacité, et qui ont montré à quel point elle était incapable de l’emporter sur leurs opinions, alors qu’ils s’empressent aujourd’hui de l’exercer sur les autres : toute la rigueur du monde pouvait-elle les rapprocher d’un seul pas d’une adhésion intime et sincère aux opinions qui prédominaient alors ? Et qu’ils ne viennent pas me dire que c’est parce qu’ils étaient assurés d’être dans le vrai car, dans ce qu’il croit, tout homme est persuadé qu’il a raison.
Locke, Essai sur la tolérance
Série ES :
Sujet 1 : Peut-on se voir tel que l’on est ?
Sujet 2 : La technique résout-elle tous les problèmes qui se posent au travail ?
Sujet 3 : Expliquez le texte suivant :
"Le discours qui suscite la bienveillance chez les juges, c’est celui-là qui est à même de persuader. Or, ce n’est pas le discours rhétorique qui suscite la bienveillance, mais le discours sans apprêt*, qui laisse apparaître la marque de l’homme ordinaire. De fait, tous sont opposés au discours de l’orateur parce qu’ils détestent sa surabondance : car, même si ce sont des choses justes que l’orateur établit, ils ont l’impression que ce n’est pas la nature des faits, mais l’artifice de l’orateur qui les leur fait apparaître justes. Au contraire, tout un chacun est favorable au discours de l’homme ordinaire, qu’il tient pour faible, et attribue plus de justice à ce qui est moins juste, parce que celui qui l’établit est un homme ordinaire qui s’exprime sans apprêt. C’est pour cette raison qu’il n’était pas permis autrefois aux Athéniens de procurer un défenseur à ceux qui étaient jugés devant le conseil de l’Aréopage** : mais c’est sans subtilité et sans ruse que chacun, dans la mesure de ses moyens, parlait pour se défendre. En outre, si vraiment les orateurs avaient foi en leur propre capacité de persuasion, ils n’auraient pas besoin de provoquer ni pitié ni lamentations ni indignation ni tout autre sentiment de ce genre - toutes choses qui, en vérité, ne persuadent nullement, mais faussent l’opinion des juges et obscurcissent la justice".
Sextus Empiricus, Contre les rhéteurs