Mercredi, un élève de 5ème bousculait violemment une professeur au collège Marcel Goulette à Piton Saint-Leu. La réaction de la communauté éducative a été immédiate : ni minimiser, ni stigmatiser, un acte qui reste exceptionnel. Mais pour éviter que l’événement puisse se répéter, le collège prend des mesures, dans un contexte national qui fait débat au sein de la communauté éducative.
Mercredi matin, alors qu’il veut récupérer une casquette que son professeur, une femme âgée de 60 ans, lui a confisquée, un élève de 5ème ouvre violemment une porte de placard qui vient alors heurter le professeur. Devant la violence du choc, la femme tombe et reste inconsciente plusieurs minutes durant. La veille, dans la région lyonnaise, un élève menaçait un professeur avec un couteau... Pourtant les statistiques sur les violences en milieu scolaire, notamment celles sur les armes, ne révèlent pas de hausse globale, mais une dégradation des relations avec les adultes et une concentration dans certains établissements. Plutôt que des violences, des "incivilités".
Au collège Marcel Goulette si l’événement a choqué, c’est d’abord justement parce qu’il reste exceptionnel. Ici, cela fait des mois que la communauté éducative travaille, justement, sur un meilleur dialogue entre professeurs, parents et enfants pour que les incivilités de tous les jours diminuent. La réaction du principal, Carine Vaillard, sera donc aussi précise que ciblée, selon qu’elle s’adresse aux enfants, aux professeurs ou aux parents. Vendredi tous les parents seront d’ailleurs invités à une réunion plénière, avec l’ensemble des professeurs. Trois ou quatre semaines après la rentrée il est désormais prévu de réunir, par classe, tous les parents. Cela afin de faciliter la co-gestion, selon Daniel Favre, professeur d’anglais et secrétaire du SNES : "on doit avoir un dialogue en co-responsabilité avec les familles : avec le collège, les parents d’élèves. Il doit se passer quelque chose dans la communauté scolaire" affirme-t-il. Il est également envisagé d’utiliser des heures pour parler de l’établissement : ce qui va, ce qui ne va pas, et de faciliter ainsi les rapports de confiance. "L’important c’est que les élèves s’expriment" ajoute Daniel Favre. Un nouveau règlement intérieur et un quelques modifications au carnet de correspondance sont également au programme.
Au centre de la problématique : l’autorité et, plus largement, les valeurs. "Les enfants n’ont pas forcément la même échelle de valeurs que les adultes dans l’établissement, et ne respectent plus l’adulte comme il le devraient" explique ainsi Carine Vaillard. "On constate, parmi l’ensemble des faits de violence, une forte augmentation de ceux visant les adultes (...) Depuis plusieurs années, dans nos propres enquêtes dans les établissements sensibles, cette dégradation de la relation aux adultes est patente", déclarait au Monde Eric Debarbieux, directeur de l’Observatoire international de la violence à l’école. "C’est tout le problème de l’autorité parentale qui est parfois prise en défaut et qui se prolonge dans le collège... " observe de son côté Daniel Favre, "des enfants ne comprennent pas pourquoi on les contraint à enlever la casquette quand ils entrent en classe, pourquoi on les contraint à faire ou refaire un exercice... On a l’impression que l’on a à faire à des enfants qui ne connaissent aucune contrainte".
Mais si le syndicaliste se soucie de rétablir la valeur "autorité" il s’oppose au tout répressif, à l’image des huit syndicats enseignants, étudiants et lycéens qui dénonçaient, samedi dans une déclaration commune, la "surenchère sécuritaire" du gouvernement sur la violence à l’école, lors du congrès à Saint-Etienne de la FCPE, principale fédération de parents d’élèves. Cette action intervenait elle-même au lendemain de la critique par le principal syndicat des chefs d’établissements, le SNPDEN, de la décision de Nicolas Sarkozy d’habiliter les personnels de direction à contrôler les cartables des élèves. Le SNPDEN juge cette décision "guère décisive" pour lutter contre l’entrée d’armes. Pour Daniel Favre, "l’élève qui rentrerait dans un établissement dans lequel il aurait été fouillé arriverait dans un état détestable... Il arriverait vraiment comme si on le suspectait de faire des mauvaises actions. Et nous ne sommes pas là pour instaurer un tel climat : nous sommes là pour travailler en confiance, pour les élèves, et avec eux".
En attendant à Saint-Denis, pas encore de portique de sécurité, mais des avis... Partagés.