Les réactions s’enchaînent après l’agression de plusieurs journalistes samedi dernier par des partisans de Thierry Robert, alors que ce dernier donnait une conférence de presse devant la préfecture.
Thierry Robert est-il allé trop loin ? C’est la question qui se pose en voyant le déferlement de réactions condamnant les agissements du député-maire de Saint-Leu qui ont conduit à l’agression de journalistes venus couvrir sa conférence de presse samedi dernier.
"Politique-spectacle" pour les uns, "show médiatique" ou encore "comportement honteux" d’un élu de la République... Les mots ne sont pas tendres envers Thierry Robert qui n’a cessé de faire parler de lui ce week-end.
En effet, n’ayant pas obtenu les 44 contrats aidés qu’il réclamait au préfet vendredi dernier, le député-maire de Saint-Leu avait décidé de passer la nuit dans les jardins de la préfecture. Mais il a été délogé dans la soirée par la police alors qu’il y avait planté sa tente. Victime d’un "malaise", Thierry Robert a chuté dans les escaliers devant la préfecture et transporté d’urgence à l’hôpital.
Mais, minerve au cou et souffrant d’une entorse cervicale, il apparaît le lendemain devant la préfecture où de nombreux sympathisants l’attendaient. C’est lors de la conférence de presse qu’il a donné par la suite que la situation a dégénéré. Thierry Robert, n’ayant pas apprécié les propos tenus à son encontre dans les colonnes du Journal de l’île, a demandé "d’éjecter" les journalistes de cet organe de presse de des lieux.
Les partisans de Thierry Robert n’ont alors pas hésité à s’en prendre physiquement aux journalistes présents. C’est en voulant s’interposer pour éviter à sa collègue du Journal de l’île d’être violentée, qu’un journaliste du Quotidien a reçu des coups au visage. Un spectacle affligeant qui s’est tenu sous les yeux de cet élu de la République qui n’est pas intervenu. Thierry Robert a présenté par la suite ses excuses aux journalistes.
Mea-culpa qui ne sera pas accepté par Thierry Durigneux, rédacteur en chef du Quotidien. Invité sur le plateau du Journal Télévisé d’Antenne Réunion, il a déclaré qu’il n’était pas "sensible aux excuses" de Thierry Robert tout en condamnant ces actes de violences envers des journalistes.
Les syndicats de la profession sont également montés au créneau. L’Union syndicale Solidaires de La Réunion s’est dite "consternée par la violence qui a déferlé lors de la manifestation organisée par un élu de la République, à l’encontre des journalistes qui ne cherchaient qu’à faire le travail". De son côté, le Syndicat National des Journalistes a déclaré que Thierry Robert a "donné une bien piètre image des élus du peuple, et devrait se souvenir que le populisme, quel que soit son étiquette officielle, a engendré les pires tragédies dans l’Histoire".
Les réactions de politiques locaux ne sont pas faites attendre non plus. Par voie de communiqué, les élus socialistes n’ont pas mâché leurs mots pour dénoncer "le comportement honteux de Thierry Robert". Pour les socialistes, "en suscitant la violence, Thierry Robert s’est lui-même frappé d’indignité". Ils vont encore plus loin en ajoutant qu’aucun "législateur ne peut bafouer avec les poings le principe souverain de la liberté de la presse" condamnant au passage la "politique-spectacle" du député-maire de Saint-Leu.
Même son de cloche pour Europe Ecologie Les Verts qui "condamne avec la plus grande fermeté les actes de violence qui ont été commis par des nervis contre des journalistes". Pour Jean-Pierre Marchau, le "député a assisté passivement à ce déchaînement de violence sans chercher à le freiner ou l’empêcher" alors que Jean-Alain Cadet dénonce le "comportement provocateur" de Thierry Robert.
Le Parti Communiste Réunionnais s’est également joint à cette "dénonciation générale" estimant "qu’il n’y a aucune excuse à s’en prendre à des travailleurs de la presse, qui plus est dans l’exercice de leur fonction". Sur le plateau d’Antenne Réunion, Paul Vergès, sénateur communiste de La Réunion, a ajouté qu’il n’y avait "aucune excuse" pour avoir agressé des journalistes. Le PCR et ses dirigeants appellent enfin "à l’effort commun pour animer une vie démocratique responsable".
De son côté, le président de la Région, Didier Robert "dénonce très fermement les actes de violences perpétrées à l’encontre des journalistes" et rappel que "rien ne peur justifier dans notre pays l’utilisation de la violence (...) même pour faire entendre des revendications".
Alors qu’elle avait immédiatement apporté son soutien à son collègue du MoDem - Thierry Robert - lors de son expulsion de la préfecture vendredi soir, la présidente du Conseil Général n’a réagi qu’hier soir à la violence dont ont fait l’objet les journalistes. Nassimah Dindar "condamne fermement ces faits et regrette que de tels agissements aient pu se produire lors de la conférence de presse de Thierry Robert".
Jean-Bernard Caroupaye, président de la Fédération nationale des transporteurs routiers de la Réunion (FNTR), s’est lui aussi "désolidarisé" de ces "agissements" devant la préfecture. Venu appuyer Thierry Robert dans son action à la préfecture samedi après-midi, Jean-Bernard Caroupaye a tenu à apporter des précisions expliquant qu’il n’était pas présent au moment des agressions des journalistes. Mais il est néanmoins resté aux côtés de Thierry Robert et de ses partisans pour le soutenir.
Cette vague de condamnation est à la hauteur des événements qui ont touché une profession dans son ensemble. La violence et l’intimidation ne devraient pas être des excuses pour mener des combats politiques. Thierry Robert a été choisi par des électeurs. Se faisant le porte-voix des revendications de la population réunionnaise, il se soumet également au jugement de ce peuple qu’il dit défendre. La brutalité pour quelque raison que ce soit ne devrait pas être cautionné par un élu de la République qui est seul responsable de ses propos et actions sur la place publique.