Le député de la 5e circonscription de La Réunion a pris la parole pour la première fois. Il s’est exprimé contre la Loi Travail et a évoqué plusieurs points du texte. Jean-Hugues Ratenon a eu quelques mots en créole.
Jean-Hugues Ratenon, député de la 5e circonscription, s’est exprimé pour la première fois à l’Assemblée nationale lors d’une session de discussion générale.
Le député Rézistans’ 974 du groupe de La France Insoumise a voulu interpeller la ministre du Travail au sujet du passage par ordonnance d’une loi.
"Nous ne serons pas vos marionnettes, vos clowns, vos figurants d’un mauvais film !"
"Vous voulez agir par ordonnance ... faîtes des ordonnances contre le mal-logement."
"Votre texte conduit (le peuple) "dan’ fénoir"
"L’extension des contrats de chantier. L’esclavage moderne est en marche !"
"Moi, madame, je sais d’où je viens. Smicard de longue date, je vois la souffrance autour de moi."
"Nou lé pas plus. Nou lé pas rien. Respect’ a nou."
"La méfiance, défiance frappe en plein coeur la vie politique. Les affaires, les promesses non tenues ont fini par disqualifier les institutions. Mais vous faîtes comme si de rien n’était. Vous continuez les mauvaises habitudes. Votre majorité est très confortable mais il ne faut pas pour autant qu’elle soit insolente et irrespectueuse.
Madame la ministre, permettez-moi de vous dire très calmement mais très fermement que ni moi, ni les collègues de mon groupe seront vos marionnettes, vos clowns, vos figurants d’un mauvais film pour amuser la galerie. Nous vous imposerons le débat, nous vous apporterons notre contribution, nous vous ferons des propositions que vous le vouliez ou pas, vous allez nous entendre ! Le peuple entendra ce que nous avons à dire.
Vous voulez agir par ordonnance et priver l’Assemblée nationale de ses pouvoirs alors allez-y ! Faîtes des ordonnances contre le mal-logement, pour le remboursement à 100% des soins médicaux, pour la transition énergétique, pour augmenter les minimas sociaux au-dessus du seuil de pauvreté, cela sauverait 400 000 Réunionnais par exemple.
Je ne suis pas venu ici pour m’amuser. L’heure est grave. À la Réunion, d’où je viens, le chômage de masse frôle les 25 % de la population active – dont 60 % chez les jeunes – et 42 % de la population survit sous le seuil de pauvreté : cette loi ne sera pas la solution. Pire, elle aggravera l’ensemble des problèmes !
Madame la ministre, le peuple a besoin de clarté, de soleil et d’espoir. Or votre texte les conduit "dan’ fénoir" comme on dit chez nous. La primauté des accords d’entreprise sur les accords de branches pénalisera les travailleurs, notamment à la Réunion où le tissu économique est composé à 90 % de très petites entreprises dans lesquelles la représentation syndicale est inexistante.
Ces mêmes accords d’entreprises permettront également de revoir les salaires à la baisse : beau carnage social en perspective ! Mes chers collègues, mon île est touchée par la cherté de la vie due à notre insularité et aux monopoles économiques. Ce fait est même reconnu par l’État, puisqu’il accorde une prime de vie chère à ses fonctionnaires. Mais peut-être avez-vous prévu, madame la ministre, d’étendre par ordonnance cette prime à l’ensemble des Réunionnaises et des Réunionnais ?
Autre point : l’extension des contrats de chantier : elle n’est rien d’autre que le prélude à la fin des contrats à durée indéterminée. En bref, l’esclavage moderne est en marche !
Vous préférez par ailleurs ouvrir le robinet des licenciements alors que les entreprises réunionnaises, comme leurs homologues dans l’Hexagone, ont surtout besoin de remplir leurs carnets de commandes. Et j’en passe, madame la ministre.
Autant de poignards que vous plantez dans le dos des travailleurs, lesquels, paradoxalement, madame la ministre, s’appauvrissent tout en travaillant ! Mes chers collègues, il est temps de revenir à la réalité du peuple.
Qui, dans cet Hémicycle, peut prétendre avoir vécu des années au Smic ? Qui, dans cette assemblée, a du mal à payer son loyer ou ses factures d’eau ? Qui a les larmes aux yeux en se levant le matin car il se demande ce qu’il va mettre dans la marmite pour nourrir ses enfants ?
Qui, ici, compte dans sa famille une personne âgée qui est obligée de se cacher pour mourir car la pauvreté l’a privée de toute dignité ? Qui, mesdames et messieurs ? Levez le doigt ! Personne.
Beaucoup parmi nous acceptent l’inacceptable, c’est-à-dire ce projet de loi qui entraînera encore plus de souffrance et de malheur.
Moi, madame, je sais d’où je viens. Smicard de longue date, travailleur pauvre ayant bénéficié du RSA activité, je sais de quoi je parle puisque je vois la souffrance autour de moi.
Aussi dis-je à mes collègues de La République en marche : n’oubliez pas votre humanité, faites preuve d’empathie à l’égard des plus faibles d’entre nous et gardez votre liberté de penser et d’agir : ne votez pas comme un seul homme ce texte de régression sociale.
Pour conclure, je vous dirai, madame la ministre : Nou lé pas plus. Nou lé pas moins. Respect’ a nou."