Jeune, diplômée et militante verte depuis l’âge de 18 ans, Vanessa Miranville défend les idées d’Europe Ecologie / les Verts Réunion aux prochaines régionales. Avec elle, l’écologie sociale et économique arrive bien sur le plan politique. « Le recyclage des idées est bien plus compliqué que le recyclage du plastique » explique t’elle en toute liberté dans cette interview.
Europe Ecologie / les Verts Réunion et se présentent aux prochaines élections régionales avec une vision de la vie politique et publique différente de celle observée jusqu’à présent : "nous pensons en effet qu’il faut avant tout assainir ces 2 mondes, car si l’on a de l’argent, mais qu’il est gaspillé, alors l’action politique ne sert à rien" déclare d’emblée Vanessa Miranville, numéro deux sur la liste.
Volontaire et sévère avec le monde politique aux affaires actuellement dans notre île, ce professeur agrégée de mathématiques de 26 ans trouve qu’aucun homme politique ne développe de vision environnementale : "La vision politique est une chose et l’action politique en est une autre ! On ne fait pas du neuf avec du vieux, le recyclage des idées est bien plus compliqué que le recyclage du plastique. Un plastique recyclé reste un plastique, une idée politique dépassée recyclée reste une idée politique dépassée".
Que proposent Europe Ecologie / les Verts Réunion ? De passer à l’action explique Vanessa Miranville, à condition "d’avoir plusieurs élus à la Région" précise t’elle. Cette militante verte depuis l’âge de 18 ans n’a qu’une volonté "lier la lutte contre la précarité et les inégalités à la reconversion écologique de l’économie". En bonne enseignante, l’éducation et la lutte contre l’illettrisme reste une de ses priorités : "On ne peut pas accepter qu’il y ait encore 110 000 illettrés dans une île qui fait partie de l’Europe politique. Il nous faut agir massivement, par exemple, en libérant les lycées le soir pour des cours pour adultes".
Enfin concernant les grands travaux, Europe Ecologie / Les Verts Réunion proposent l’arrêt du projet de nouvelle route du Littoral qui "est une folie". Leur priorité : "celle d’un transport en commun performant, de St Benoît à St Joseph, car nous ne pouvons plus continuer à subir le tout voiture. Seul le rail peut offrir la ponctualité, le confort et la sécurité pour faire abandonner la voiture. La première étape qui doit être le tronçon St Paul - St Denis doit démarrer au plus vite".
Dans cette interview, sans langue de bois, accordée à linfo.re, Vanessa Miranville partage sa vision collective contre l’uniformité et les inégalités en concluant : "Les politiques ont intégré les mots de l’écologie, mais absolument pas son esprit et sont encore moins passés à l’acte. Probablement car ils ne sont dans le fond pas convaincus. Les problèmes d’aujourd’hui ne sont pas ceux d’hier, il faut des idées et des gens neufs pour les traiter".++++
Les écolos ont-ils encore quelque chose à dire maintenant que tous les politiques parlent d’environnement ?
Les Verts et plus largement Europe Ecologie, rassemblement de tous les mouvements écologistes (politiques comme CAP21, associatifs comme « Priorité la Rivière », des agriculteurs venant de l’ADEFAR ou des professionnels de santé de l’ARMSE), ont évidemment leur mot à dire.
Pourquoi ? Car nous sommes les seuls à avoir un discours vrai depuis le début, l’écologie est par essence au cœur de nos préoccupations. Elle n’est pas pour nous un simple effet de mode, à une époque où tout le monde « se met au vert », car qui aujourd’hui pourrait oser se dire contre l’écologie ?
Mais nous, les Verts et Europe Ecologie, nous voulons passer des mots aux actes, car les grands discours, aussi beaux soient-ils, n’empêcheront jamais le climat de se réchauffer…
Que dites-vous de différent des autres ?
Finalement, en ce qui concerne l’écologie, les autres partis tiennent maintenant les mêmes discours que nous : la « vague verte » qui envahit le monde politique brouille notre discours écologiste. Les autres partis parlent aujourd’hui d’écologie et d’environnement… mais continuent, pour l’essentiel, de faire comme avant. Ils ne changent leurs propositions que de manière marginale : un peu de transport en commun par ci, un peu d’énergie solaire par là. Leur conversion à l’écologie n’est pas vraiment crédible et sérieuse. Ce n’est que du marketing électoral. Par ailleurs nous nous engageons aussi en matière d’éthique politique : pas de cumul des mandats, refus du clientélisme par exemple. Mais pour pouvoir agir et mettre en œuvre notre politique, nous devons avoir plusieurs élus à la Région !
Les verts font-ils aujourd’hui de la "real politique" ?
La « real politique », c’est prendre la mesure du caractère dramatique de la situation sociale et écologique du monde et apporter des solutions pour y remédier, à notre niveau, à la Réunion. La crise sociale et financière a montré qu’il fallait en finir avec l’univers de l’argent roi et remettre l’homme au cœur de l’économie. La crise écologique : réchauffement climatique, raréfaction des matières premières et des sources d’énergie, accumulation des déchets toxiques, appellent des changements fondamentaux. C’est le sens de nos propositions pour une reconversion écologique de l’économie. C’est dans tous les domaines d’activités qu’il faut changer les habitudes et les modes de production. Ceux qui choisissent de continuer comme avant, le tout voiture, les gaspillages, le saccage de l’environnement, ne sont pas réalistes. Ils nous conduisent droit dans le mur.++++
Que feriez vous aujourd’hui pour la Réunion ?
Tout d’abord, on ne peut pas accepter d’avoir autant de chômeurs et de personnes en situation précaire à la Réunion. Ce qu’il faut, c’est lier la lutte contre la précarité et les inégalités à la reconversion écologique de l’économie. C’est de cette façon qu’on va créer des dizaines de milliers d’emplois dans les nouveaux secteurs d’activité : éco-urbanisme, énergies renouvelables, maîtrise de l’énergie, gestion des déchets… En fait c’est faire de la crise une opportunité pour changer, à la fois notre mode de développement économique, nos comportements et promouvoir une répartition plus équitable des richesses.
Une autre priorité est la lutte contre l’illettrisme. On ne peut pas accepter qu’il y ait encore 110 000 illettrés dans une île qui fait partie de l’Europe politique. Il nous faut agir massivement, par exemple, en libérant les lycées le soir pour des cours pour adultes.
Quels grands projets environnementaux faudrait-il lancer au plus vite dans notre île ?
La priorité, c’est celle d’un transport en commun performant, de St Benoît à St Joseph, car nous ne pouvons plus continuer à subir le « tout voiture ». Seul le rail peut offrir la ponctualité, le confort et la sécurité pour faire abandonner la voiture. La première étape qui doit être le tronçon St Paul - St Denis doit démarrer au plus vite. Parallèlement il faut arrêter le projet de nouvelle route du Littoral qui est une folie et concentrer les moyens sur ce mode de transport par voie ferrée.
Une autre priorité, c’est changer l’agriculture, la rendre propre, réduire fortement les engrais et les pesticides, pour la santé de tous. Dans un contexte où les transports vont devenir de plus en plus coûteux, il faut aussi donner la priorité à l’autosuffisance alimentaire, y compris par la reconversion d’une partie de la canne.
Enfin, nous devons trouver une solution au problème de l’énergie, car la flambée des prix des énergies fossiles sans solution alternative sera une catastrophe sociale. Pour cela, il faut explorer toutes les pistes possibles, notamment diversifier les sources d’énergie renouvelables et diminuer les consommations d’énergie.++++
En quoi votre candidature aux régionales est elle différente des autres ?
Notre candidature aux régionales est différente car notre vision de la vie politique et publique est différente. Nous pensons en effet qu’il faut avant tout assainir ces 2 mondes, car si l’on a de l’argent, mais qu’il est gaspillé, alors l’action politique ne sert à rien.
Pour cela, il faut mettre au pouvoir des personnalités nouvelles, notamment des personnes jeunes (nos 2 têtes de liste ont 34 et 26 ans !), qui vivront les changements sociaux et climatiques en 2030, en 2050 et qui sont donc mieux placées pour décider de l’avenir de la Réunion.
Par exemple, les propositions en matière de transports en commun et d’énergie de demain, seront d’autant plus crédibles que les personnes qui décident aujourd’hui les utiliseront eux-mêmes demain.
Nous ne sommes pas dans les jeux de pouvoir, de répartition des postes, des « petits arrangements entre amis (et en famille) ». Chez nous, l’éthique n’est pas qu’un mot.
Pensez vous les réunionnais aujourd’hui prêts à voter massivement pour les écologistes ?
Oui, nous pensons que les Réunionnais sont prêts à accepter un changement qui prenne réellement en compte l’urgence écologique, nous l’avons bien ressenti au moment du sommet de Copenhague, dans les discussions que nous avons eues sur les marchés. Ils sont prêts aussi à reprendre le pouvoir qu’ils n’ont plus, et à assumer leur responsabilité citoyenne.
Les Réunionnais sont prêts à voter pour nous car ils voient bien qu’aucun des autres partis traditionnels n’a réussi à répondre à leurs attentes, qu’ils ne se remettent pas en cause et ne sauront donc pas traiter les problèmes de la Réunion.
On a souvent l’impression que vous êtes contre tout : la route des tamarins, la voiture, les emballages. Comment pouvez vous inverser cette perception ?
En proposant des moyens concrets d’écologiser la Réunion. Un exemple : nous ne sommes pas contre la route des Tamarins, nous sommes pour un transport en commun pratique et attractif, où les Réunionnais pourraient prendre un bus ou un vélo pour aller de chez eux à la station de départ et de la station d’arrivée au travail, au supermarché…
Autre exemple, nous ne sommes pas contre les emballages qui sont utiles, mais nous sommes pour encourager les produits à emballage réduit par une plus faible taxation.
Nous ne sommes pas contre une agriculture qui produise en abondance, mais à condition qu’elle soit plus propre et plus saine, et qui n’intoxiquerait pas les Réunionnais et le lagon.++++
Comment rêvez vous la Réunion dans 50 ans ?
Une île préservée, qui a gardé ses richesses naturelles, où les Réunionnais, tous instruits et formés, vivent dans un cadre de vie agréable, dans un cadre démocratique renouvelé et réel.
Une île où les inégalités ont été balayées, où chacun trouve sa place, professionnelle et personnelle, et où chacun ait les moyens de nourrir, loger, habiller, soigner sa famille dignement.
Je rêve également d’une île qui ait su conserver sa richesse culturelle, ne pas s’être fait absorber par l’uniformité de la mondialisation, dans laquelle chacun puisse vivre sa foi, sa culture ou ses opinions dans le respect collectif.
Y a t’il aujourd’hui un homme politique à la Réunion qui a une vision environnementale que vous partagez ?
Malheureusement, non. La vision politique est une chose et l’action politique en est une autre !
On ne fait pas du neuf avec du vieux, le recyclage des idées est bien plus compliqué que le recyclage du plastique. Un plastique recyclé reste un plastique, une idée politique dépassée recyclée reste une idée politique dépassée.
Les politiques ont intégré les mots de l’écologie, mais absolument pas son esprit et sont encore moins passés à l’acte. Probablement car ils ne sont dans le fond pas convaincus. Les problèmes d’aujourd’hui ne sont pas ceux d’hier, il faut des idées et des gens neufs pour les traiter.