"Les policiers, ils arrêtent, ils fouillent, ils nous parlent mal". Pour tenter de dépasser ces jugements et nouer un lien plus humain avec les institutions, des jeunes de Sevran ont été conviés jeudi à un circuit ludique, occasion de rencontrer policiers et chauffeurs de bus.
SEVRAN (AFP) - "Les policiers, ils arrêtent, ils fouillent, ils nous parlent mal". Pour tenter de dépasser ces jugements et nouer un lien plus humain avec les institutions, des jeunes de Sevran ont été conviés jeudi à un circuit ludique, occasion de rencontrer policiers et chauffeurs de bus.
En début de matinée, plusieurs dizaines de jeunes très motivés de 10 à 13 ans, la plupart venus des cités sensibles des Beaudottes et de la cité Basse, se sont élancés dans cette course, le gagnant étant le premier à boucler le circuit en ramenant un questionnaire rempli auprès des interlocuteurs interrogés à chaque étape : policiers, sapeur-pompiers, responsables municipaux, au pôle emploi etc.
A l’origine de l’opération, un ancien policier du Raid, unité d’élite de la police nationale, Bruno Pomart. Il faut "revaloriser la notion d’Etat et de bien public auprès des jeunes", explique-t-il, en reconnaissant que "la plus grosse problématique, c’est la police".
"Au-delà de la haine d’une minorité de jeunes contre la police, il y a une véritable incompréhension", estime M. Pomart, aujourd’hui chargé de la mission prévention à la police nationale. "La jeunesse a de moins en moins de limites or la police doit rétablir les règles", dit-il, jugeant qu’il "faut allier prévention et sécurité, sinon on n’y arrivera jamais".
Première étape de la course pour un groupe : le commissariat de Villepinte, où le ministre de l’Intérieur, Brice Hortefeux, s’est rendu début avril après l’incendie et le caillassage d’un bus dans la ville toute proche de Tremblay.
Questions au commandant Isabelle Rivière et au gardien de la paix et correspondant scolaire Hannafi Taoussart : "Pourquoi vous venez toujours dans les cités ?" "Est-ce que vous arrêtez les personnes ?", "Pourquoi vous faites des contrôles de routine ?"
Quand le commandant demande de cocher une mission de la police, il faut passer par "arrêter", "mettre des amendes", "sanctionner", avant d’arriver à la réponse attendue : "protéger les gens".
Hannafi Taoussart n’est pas surpris. "Dans les écoles, pendant les 10 premières minutes, je n’entends que des reproches", dit-il, ajoutant : "Mais quand je suis en patrouille, on me reconnaît et ça se passe mieux".
Quant aux jeunes, ils tiennent après cette rencontre un discours un peu plus nuancé. "Ils étaient gentils", disent certains. "Dehors, ils sont plus méchants", lancent d’autres.
Autre étape du raid : le bus de la citoyenneté. "Les contrôleurs exercent un métier comme un autre", déclare le responsable du service prévention de Veolia, Mario de Oliveira.
Les jeunes disent ne pas comprendre les caillassages de bus, comme celui qui s’est produit le 24 avril à Sevran. "C’est des voyous qui font ça, des gens qui n’ont rien à faire. Et en plus, c’est leurs parents qui prennent le bus et qui sont pénalisés", lancent-ils.
Leur accompagnateur, Osiris Tedga, 20 ans, est plus critique : "Aux Beaudottes, on ne peut pas dialoguer avec les chauffeurs et les contrôleurs", dit-il, sceptique devant les arguments de Mario de Oliveira et d’un chauffeur.
Pour Bruno Pomart, ce raid s’adresse aux 10-13 ans, car "c’est un créneau d’âge très intéressant où on arrive encore à faire passer des messages, avant l’adolescence".