Le Conseil constitutionnel a censuré mardi la loi pénalisant la négation du génocide arménien, un texte qui a provoqué la brouille entre la France et la Turquie. Nicolas Sarkozy qui soutenait cette loi a d’ores et déjà promis une nouvelle version moins polémique.
Jugée contraire à la liberté d’expression, la loi pénalisant la négation du génocide arménien de 1915 a été censurée par le Conseil constitutionnel. Les Sages expliquent les raisons de cette censure : "(…) en réprimant la contestation de l’existence et de la qualification juridique de crimes qu’il aurait lui-même reconnus et qualifiés comme tels (en 2001, Ndlr), le législateur a porté une atteinte inconstitutionnelle à l’exercice de la liberté d’expression et de communication".
Dans un communiqué, le Conseil constitutionnel s’appuie sur l’article 11 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 qui stipule que "la liberté de communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l’homme".
Nicolas Sarkozy, qui soutenait ce texte controversé, a réagi dans un communiqué publié par la présidence qu’il "mesure l’immense déception et la profonde tristesse de tous ceux qui avaient accueilli avec reconnaissance et espoir l’adoption de cette loi destinée à les protéger contre le négationnisme (...) menace contre notre communauté nationale".
Pour autant, le chef de l’Etat n’entend pas renoncer à ce projet de loi. Il "a chargé le gouvernement de préparer un nouveau texte, prenant en compte la décision du Conseil constitutionnel", fait savoir l’Elysée.
Pour sa part, la députée UMP de Marseille, Valérie Boyer, qui avait défendu le texte, s’est déclarée "triste et déterminée" après la censure. "Aujourd’hui en droit français, nous avons deux sortes de victimes et de descendants de victimes", fustige-t-elle, évoquant "une grave inégalité de traitement" entre Arméniens et Juifs.
Le candidat PS à la présidentielle François Hollande a estimé que ce projet de loi a été présenté à un moment inopportun. Il s’est engagé à le reprendre, s’il est élu. D’après lui, ce sujet hautement sensible devrait être abordé "dans l’apaisement et dans la conciliation". "C’était une loi qui devait réconcilier mais elle n’était pas présentée forcément au meilleur moment", commente-t-il en marge d’une visite au salon de l’agriculture.
De son côté, le gouvernement turc a rapidement salué la décision du Conseil constitutionnel français qui "a évité une probable grave crise entre la France et la Turquie", selon les propres termes du vice-Premier ministre Bülent Arinç.
Ce texte, adopté par le Parlement français le 23 janvier dernier, avait provoqué une brouille diplomatique et commerciale entre la France et la Turquie. Cette nouvelle loi prévoyait de punir d’un an de prison et de 45.000 euros d’amende toute négation publique d’un génocide reconnu par la loi française, y compris le génocide arménien de 1915.