Les actes de suicide s’accentuent avec la crise selon l’association France Prévention Suicide. Par le biais de son président, Michel Debout, ce collectif interpelle les autorités compétentes sur un fait social souvent ignoré.
«
Si depuis 2008, le nombre des sans-emploi s’est accru de 648.500 personnes, 10.780 tentatives de suicide et 750 suicides sont liés directement au chômage », observe l’association
France Prévention Suicide, se basant sur le dernier rapport concernant le suicide en France publié par l’Institut de veille sanitaire (INVS) en décembre 2011. Michel Debout note cependant qu’il s’agit seulement d’« une fourchette basse à laquelle il faut aussi ajouter l’impact de la précarité, la pauvreté, l’isolement, les problèmes sociaux et familiaux ».
« Je suis en colère face à l’inaction des pouvoirs publics », s’insurge Michel Debout. « Nous ne disposons d’aucun chiffre récent pour mesurer le phénomène. L’étude de l’INVS s’appuie sur des chiffres de 2009 », note ce spécialiste du suicide et professeur de médecine légale.
Le chômage qui ne cesse d’accroître dans toute la France en raison de la crise économique entraîne de nombreux dégâts latéraux selon lui. « Le licenciement entraîne la perte de repères et de confiance en soi. Quand le chômage s’installe et dure, vient un sentiment d’injustice, de colère. La personne se déprécie. La dépression et les pensées suicidaires, voire le passage à l’acte ne sont plus loin ». Parallèlement, la pression est devenue une pratique courante dans les entreprises déjà asphyxiée par cette crise. Du coup, les menaces de licenciements pèsent de plus en plus aux salariés, induisant souvent à un acte de suicide. « On l’a vu chez France Telecom : on exige des salariés toujours plus de performance, de compétitivité, de rentabilité », rappelle le professeur.
Ce spécialiste a d’ailleurs cité le cas de Grèce où les actes de suicide ont connu une hausse de 40 % depuis le début de la crise qui mine ce pays de l’UE. L’association a entre autres rappelé que le même phénomène a été observé deux ans après la crise de 1929.
Pour limiter les dégâts, l’association appelle à une prise en charge psychologique des chômeurs. « Quelqu’un qui perd son travail, perd la médecine qui va avec. Médicalement parlant, on ne s’intéresse pas aux chômeurs à un moment où ils sont le plus à risque », déplore Michel Debout. « Un chômeur se suicide parce qu’il est déjà socialement mort. C’est terrible de voir une personne qui a le sentiment de devoir disparaître parce qu’elle a disparu aux yeux des autres », poursuit le spécialiste qui incrimine les pouvoirs publics pour le peu d’engagement qu’ils manifestent alors que des associations et des professionnels qui travaillent dans la prévention du suicide fait déjà de leur mieux pour redresser la situation.
Le 11 févier prochain, un colloque sur le suicide aura lieu au Sénat à l’issue duquel un appel aux candidats à la présidentielle sera lancé par l’association France Prévention Suicide afin qu’ils s’engagent plus activement face aux effets psychosociaux de la crise.