"Ca fait trois nuits que je dors là. Cette fois, je veux me battre pour que mes enfants aient un logement". Valentine Tralou, 46 ans, a mis de côté son travail pour engager avec d’autres mères un bras de fer avec les autorités sur ce bout de trottoir du XVe arrondissement de Paris.
PARIS (AFP) - "Ca fait trois nuits que je dors là. Cette fois, je veux me battre pour que mes enfants aient un logement". Valentine Tralou, 46 ans, a mis de côté son travail pour engager avec d’autres mères un bras de fer avec les autorités sur ce bout de trottoir du XVe arrondissement de Paris.
Le campement a été établi dimanche par le Collectif des oubliés du Dalo (droit au logement opposable) et il risque de durer. Depuis sa création en octobre 2009, le collectif, avec le soutien du Dal, a mené une dizaine d’opérations ponctuelles sans grand effet sur le relogement des familles.
Ces dernières "poussaient pour qu’on établisse un nouveau campement", assure à l’AFP Jean-Baptiste Eyraud (Dal).
"Nous sommes obligés de recourir à nouveau à une action de longue durée, d’aller au conflit", a-t-il déploré mercredi, rappelant que le campement de la rue de la Banque (IIe) lancé en octobre 2007 avait permis le relogement bon an mal an de presque toutes les 374 familles.
Au pied d’un immeuble d’habitation appartenant à un particulier, et vide depuis 26 ans, d’immenses bâches bleues ont donc été accrochées à mi-mur, qui protègent un peu de la pluie et surtout du vent.
Des cartons au sol et quelques matelas tentent d’isoler du froid alors que le printemps ne perce pas, et les habituelles banderoles jaunes du Dal demandent la "réquisition" du lieu.
Un rendez-vous au secrétariat d’Etat au logement dans la matinée n’a rien donné de concret, selon la délégation des mal logés. Les familles vont manifester à 18H00 du côté du ministère, et un autre rendez-vous est déjà prévu samedi pour soutenir les campeurs.
La journée, les hommes partent travailler, les femmes restent là pour tenir le campement.
Auxiliaire de vie en maison de retraite et auprès de particuliers, Valentine Tralou pensait accéder à un logement sans passer par cette case trottoir. Mère célibataire, elle vivote avec trois enfants de 16, 6 et demi et 5 ans dans un studio insalubre de 18 m2.
"On dort tous les quatre dans le même lit, dans le sens de la largeur, on a les pieds qui dépassent. A l’école, on me dit que les enfants sont fatigués. Oui, on est tous fatigués", lâche cette femme vigoureuse, reconnu prioritaire Dalo en octobre 2008.
Les femmes veulent toutes raconter leur histoire particulière, et ce sont les mêmes mots qui se bousculent sur toutes les lèvres : "trop de fatigue", "stress", "pas d’intimité", l’aîné(e) au collège ou au lycée qui "étudie dans les toilettes", la "honte" de recevoir chez soi...
A cinq personnes dans un studio, dont trois enfants âgés de 2 ans et demi à 20 ans, en instance d’expulsion, Nadia n’a trouvé qu’une solution : "on préfère rester dehors dans la rue, au square, que de rentrer. Au moins il y a de l’espace !"
Son petit, qui dort dans la poussette, souffre "d’épilepsie et d’infections ORL et bronchiques aggravées", selon un mot de son médecin généraliste pour appuyer sa demande de relogement. L’enfant est pris en charge à l’hôpital. Amère, elle dit : "depuis un an, finalement, j’habite à l’hôpital Trousseau".