Les parties civiles au procès de l’accident du Concorde ont achevé mercredi leurs plaidoiries, à la veille du réquisitoire du parquet, en demandant au tribunal correctionnel de Pontoise de prononcer dans quelques mois un jugement "symbolique" de l’importance de la sécurité aérienne.
PARIS (AFP) - Les parties civiles au procès de l’accident du Concorde ont achevé mercredi leurs plaidoiries, à la veille du réquisitoire du parquet, en demandant au tribunal correctionnel de Pontoise de prononcer dans quelques mois un jugement "symbolique" de l’importance de la sécurité aérienne.
"Je demande que votre juridiction prenne une décision importante, symbolique sur ce qui s’est passé", afin de "dire que la sécurité, c’est essentiel", a conclu Me Christian Bousserez, l’un des avocats les plus assidus depuis le début du procès il y a trois mois et demi.
"Comment peut-on tourner la page quand on a assisté à un événement pareil ?", a-t-il demandé au nom de sa cliente, Sabrina Manou, "traumatisée" depuis que le Concorde en feu avait frôlé, le 25 juillet 2000, la voiture dans laquelle elle circulait avec sa nièce de trois ans. Le supersonique s’était écrasé quelques mètres derrière elle, à Gonesse (Val d’Oise), faisant 113 morts dont quatre au sol.
Me Hania Gouttière, conseil des familles de deux jeunes stagiaires polonaises tuées dans l’hôtel sur lequel s’est écrasé l’avion, a décrit la "douleur" de leurs familles, qui se sont senties "abandonnées, comme des victimes de seconde zone". Elle a par ailleurs dénoncé un "formidable consensus politico-financier pour faire voler un avion dont tout le monde savait qu’il avait des dangers".
Me Karim Ouchik a décrit les "traumatismes" de ses clients, plusieurs témoins de l’accident ainsi que la famille d’une troisième tuée au sol, une jeune femme de ménage embauchée dans l’hôtel la veille de l’accident, et dont la mère s’est depuis "murée dans le silence".
Deux des avocats ont demandé au tribunal d’ordonner une expertise psychologique pour évaluer les préjudices subis par leurs clients. Si cette expertise était refusée, ils ont demandé des dommages et intérêts de plusieurs centaines de milliers d’euros pour chacun.
Au total, le montant des indemnités demandées par les parties civiles dans leurs plaidoiries entamées lundi atteint 16,4 millions d’euros, dont 15 millions réclamés par la seule Air France à Continental Airlines.
En incluant les montants demandés au cas où les expertises médicales seraient refusées, la somme totale dépasse 19 millions d’euros.
Jeudi après-midi, le procureur Bernard Farret et le vice-procureur Jean-Pascal Oualid entameront leur réquisitoire, qui doit se terminer vendredi avec l’énoncé des peines requises.
Le procès se termine le 28 mai mais le jugement ne devrait pas être rendu avant la fin de l’année.
Six prévenus comparaissent, dont Continental Airlines. Selon l’accusation, la catastrophe a été déclenchée par une lamelle en titane perdue par un DC10 de la compagnie américaine, qui avait décollé de Roissy quelques minutes avant le supersonique.
Continental nie toute responsabilité dans l’accident et défend une autre thèse : l’appareil aurait pris feu avant même de rouler sur la fameuse lamelle.
Deux de ses employés, John Taylor, 42 ans, et Stanley Ford, 71 ans, sont poursuivis pour avoir mal effectué et contrôlé une réparation sur la lamelle incriminée.
Trois anciens responsables français de l’aéronautique sont accusés de ne pas avoir tiré les leçons des incidents de pneus ayant affecté le Concorde dès 1979 : deux anciens de l’Aérospatiale, Henri Perrier, 80 ans, et Jacques Herubel, 74 ans, et un ex-cadre de la Direction générale de l’aviation civile (DGAC), Claude Frantzen, 73 ans.