Les députés espagnols ont approuvé jeudi d’extrême justesse l’impopulaire plan d’austérité, d’un montant de 15 milliards d’euros, du gouvernement socialiste, lors d’un vote révélateur du profond isolement de José Luis Rodriguez Zapatero, qui a sauvé sa tête sur le fil.
MADRID (AFP) - Les députés espagnols ont approuvé jeudi d’extrême justesse l’impopulaire plan d’austérité, d’un montant de 15 milliards d’euros, du gouvernement socialiste, lors d’un vote révélateur du profond isolement de José Luis Rodriguez Zapatero, qui a sauvé sa tête sur le fil.
Une seule voix d’avance (169 votes pour, 168 contre, et 13 abstentions) a permis l’adoption du décret-loi du gouvernement incluant une baisse de salaire pour les fonctionnaires dès juin et un gel des retraites en 2011 afin d’accélérer la réduction des importants déficits publics du pays.
Le gouvernement socialiste, qui avait juré de ne jamais toucher aux acquis sociaux, a été contraint d’annoncer ces mesures sous la pression des marchés et de ses partenaires européens.
Il espère économiser 15 milliards d’euros en 2010 et 2011 afin d’accélérer la réduction des déficits publics qui ont explosé à 11,2% du PIB en 2009 et que Madrid veut ramener à 3% en 2013.
Un vote négatif aurait probablement entraîné la chute du Premier ministre Zapatero et eu des répercussions désastreuses pour l’Espagne et la zone euro sur des marchés financiers déjà extrêmement nerveux.
L’influent quotidien El Pais (centre-gauche) décrivait ce vote de "tellement important qu’une défaite du gouvernement supposerait (...) la fin abrupte de la législature" tandis que le journal de droite ABC en appelait en Une à "la nécessité nationale" d’élections anticipées.
"Ces mesures sont douloureuses, mais indispensables", avait déclaré avant le vote la ministre de l’Economie et des Finances, Elena Salgado, devant un parlement archicomble.
Seuls les députés socialistes, qui n’ont pas la majorité absolue, ont approuvé le texte.
Les autres groupes parlementaires ont voté contre -à l’image des conservateurs du Parti populaire (PP), hostiles au gel des retraites, ou des écolo-communistes, remontés contre la baisse des salaires des fonctionnaires -, ou bien se sont abstenus.
Le texte a été sauvé grâce à l’abstention des 10 députés nationalistes catalans de Convergencia i Unio (CiU), qui ont invoqué le sens de la "responsabilité".
"Tout le monde sait ce qui arriverait si le gouvernement n’avait pas la capacité de faire passer ce texte. La Bourse plongerait et le marché châtierait notre dette (...). Je ne veux pas que l’Espagne soit mise sous tutelle comme la Grèce", a expliqué leur secrétaire général Josep Antoni Duran i Lleida.
Mais le leader des nationalistes catalans a fait payer cher sa neutralité à M. Zapatero, tassé dans son fauteuil, le visage fermé et sombre.
"Votre temps est fini", lui a-t-il lancé. "Ne convoquez pas d’élections maintenant parce que le pire qui pourrait arriver à ce pays en pleine crise économique serait de se retrouver sans gouvernement".
"Faites les devoirs qu’on vous impose de l’extérieur (...) et quand arrivera le vote du budget (2011, ndlr) et que vous ne pourrez pas le faire approuver, convoquez les élections", a-t-il ajouté.
Mauvais augure pour M. Zapatero : les députés du Parti nationaliste basque (PNV) ont voté contre son décret-loi, alors que ce parti est celui qui a permis au gouvernement de faire adopter ses précédentes lois budgétaires.
En chute libre dans l’opinion selon un récent sondage, M. Zapatero va maintenant s’atteler à la restructuration des caisses d’épargne régionales plombées par l’éclatement de la bulle immobilière et à une délicate réforme du marché du travail, qui l’a contraint à annuler jeudi un voyage au Brésil.
Un nouveau bras de fer est en vue avec les syndicats qui ont appelé à une grève des fonctionnaires le 8 juin et n’excluent pas une grève générale, alors que le FMI a appelé lundi Madrid à des réformes structurelles "d’urgence".