Martine Aubry est convoquée chez le juge d’instruction aujourd’hui en vue d’une possible mise en examen pour homicides involontaires dans un volet de l’enquête sur le drame provoqué par l’amiante, des faits qui remontent à plus de 25 ans.
Ce mardi 6 novembre dans l’après-midi, l’ancienne-première secrétaire du PS sera entendue en sa qualité d’ancienne directrice des relations du travail, un poste qu’elle a occupé de 1984 à 1987 auprès du ministère du Travail. A l’issue de son audition auprès de la juge d’instruction de Paris, Marie-Odile Bertella-Geffroy, elle pourrait être mise en examen pour homicides involontaires dans l’une des enquêtes sur les dégâts dus à l’amiante.
Cependant, Martine Aubry a d’ores et déjà laissé entendre qu’elle pourrait demander à la chambre de l’instruction de la cour d’appel d’annuler sa mise en examen. Elle ne s’estime "pas responsable" du drame de l’amiante puisque sa carrière au ministère l’amenait à œuvrer activement à la protection des salariés et de la population.
L’ex-haut fonctionnaire du ministère du Travail doit notamment s’expliquer sur l’action entreprise par les pouvoirs publics face à l’amiante dans les années 70-80. La justice, qui s’appuie sur un rapport sénatorial daté de 2005, reproche à l’Etat sa "gestion défaillante" de l’amiante, une substance dont l’effet cancérogène était connu depuis les années 50 mais n’avait été interdite qu’en 1997, alors que le premier décret réglementant son usage en France avait été publié depuis 1977.
Outre Martine Aubry, des dizaines de hauts fonctionnaires ont déjà été entendus comme témoins dans cette affaire depuis 2009.
Selon les autorités sanitaires, l’amiante serait responsable de 10 à 20% des cancers du poumon en France, et pourrait provoquer jusqu’à 100.000 décès d’ici à 2025.
Michel Parigot, vice-président de l’Andeva, qui représente la partie civile dans l’enquête, donne son avis sur la convocation de l’ex-patronne du PS.
"Rien ne permet de dire, en l’état actuel du dossier, que Martine Aubry n’aurait pas répondu à des alertes qu’elle aurait reçues" au ministère du Travail, déclare-t-il.
"Il n’y a pas dans le dossier, aujourd’hui, de preuves d’une responsabilité personnelle de Martine Aubry, or la responsabilité pénale suppose l’existence de preuves", ajoute-t-il.
Michel Parigot a toutefois montré du doigt la "responsabilité" des pouvoirs publics et de la Direction des Relations du Travail dans cette affaire.
"Avant, pendant et après le passage de Martine Aubry, la DRT n’était pas organisée de façon adéquate pour recueillir les informations objectives indispensables pour prendre les mesures adéquates", estime-t-il. "Le fait que ces mesures n’aient pas été prises aura pour conséquence, à l’avenir, le décès de milliers de personnes", déplore le vice-président de l’Andeva.
Pour autant, selon lui, "aucun élément dans le dossier ne démontre que Martine Aubry ait une responsabilité individuelle qui dépasse la responsabilité générale des pouvoirs publics".
Source : Libération