Le favori à la présidentielle et le président-candidat ont débattu pendant plus de deux heures mercredi 2 mai. Lors de face-à-face sous tension, les deux hommes se sont montrés très pugnaces. Les finalistes de la présidentielle se sont opposés frontalement sur les grands thèmes de l’emploi, du pouvoir d’achat, de la dette, de l’immigration...
Pour les deux candidats, c’était mercredi soir ou jamais. L’ultime occasion pour le candidat du Parti Socialiste (PS) François Hollande, en tête à l’issue du premier tour et dans les sondages, de porter l’estocade avant le verdict des urnes dimanche 6 mai et ultime occasion également pour le président sortant de faire valoir son bilan.
Durant plus de deux heures et devant plus de 20 millions de téléspectateurs, les deux candidats à la présidentielle ont débattu sur les grands thèmes tels que l’emploi, le pouvoir d’achat ou la dette de l’Etat. Cette rencontre a été animée par deux journalistes : Laurence Ferrari et David Pujadas.
Face aux enjeux de ce débat télévisé, Nicolas Sarkozy et François Hollande se sont tous deux déclarés "concentrés" mais non pas stressés à leur arrivée dans le studio 107,à la Plaine-Saint-Denis, près de Paris. Quatre jours avant le second tour de l’élection présidentielle, ce face à face représente le point culminant de l’entre deux tours.
Pour la première fois depuis le début de la campagne présidentielle, le président sortant et le candidat du PS se sont retrouvés face à face après s’être préparés dans le plus grand secret.
Organisé autour de quatre grands thèmes, économie et social, société, style de gouvernance et international, ce duel a été arbitré en coulisses par quatre personnes qui ont mesuré le temps de parole de chaque candidat et ce, en présence du représentant du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA).
Début de l’émission : 23h00 heure de la Réunion
David Pujadas et Laurence Ferrari ont dès le début du débat rappelé les règles et le déroulement du débat.
Interrogé par Laurence Ferrari quant à son état d’esprit, François Hollande a déclaré : "Je dois dire ce soir quel président je serai, si je suis élu. Je serai le président de la justice, car nous traversons une crise qui frappe les plus modestes. (...) Je serai aussi le président du redressement. (...) Je veux être aussi le président du rassemblement. Les Français ont trop longtemps été opposés, divisés. (...) C’est ainsi que reviendra la confiance. (...) C’est le sens du changement que je propose."
Même question posée à Nicolas Sarkozy. "J’attends que tous ceux qui regardent se fassent une idée à la fin du débat. (...) M. Hollande nous promet d’être un président extraordinaire. Je veux que ce soir, ce soit un moment d’authenticité (...) En vérité, c’est un choix historique. La France n’a pas le droit à l’erreur. Nous sommes pas dans une crise, mais des crises".
Premier thème : L’emploi et le chômage
Interrogé quant à la hausse du chômage, François Hollande a immédiatement souligné qu’il s’agit d’un record. "Il nous faut de la croissance, de la production" explique le candidat du PS avant de détailler ses propositions. Après avoir évoqué son projet de banque publique d’investissement et son projet de contrat de génération, le candidat du PS a annoncé que "l’employeur qui gardera un senior et qui embauchera un jeune en CDI ne paiera plus de cotisations sociales sur les deux emplois".
François Hollande a également noté que le chômage a fortement augmenté pendant le quinquennat de Nicolas Sarkozy et ce, "plus qu’en Allemagne". Pour le prétendant PS, "il faut de la croissance, il faut relancer la production, car 400 000 emplois industriels ont été perdus."
Nicolas Sarkozy a immédiatement contesté les chiffres du chômage annoncés par son rival, en citant des données du Bureau international du travail. "Nous avons un taux de chômage qui a augmenté deux fois moins que nos partenaires de la zone euro."
François Hollande a ensuite défendu les chiffres qu’il a présentés, et qui sont ceux du nombre d’inscrits à Pôle emploi, "4 millions de personnes aujourd’hui contre 3 millions il y a cinq ans."
"Vous admettrez qu’entre 2007 et 2012, il y a eu 4 années de crise", répond quelques instants plus tard Nicolas Sarkozy.
Le débat télévisé entre le socialiste François Hollande et le président conservateur Nicolas Sarkozy a donc débuté par de premières joutes tendues sur la notion de rassemblement et sur la situation économique.
La TVA sociale :
"Je considère que 300 euros sur un couple de smicards, c’est insupportable. Je propose que le coup de pouce sur le smic sera fonction de la croissance." François Hollande évoque aussi un forfait sur l’énergie et le blocage des prix de l’essence avant la mise en place de la TIPP, plus l’augmentation de 25% de l’allocation rentrée scolaire
Pouvoir d’achat :
"Nous avons financé 180 millions d’heures de chômage partiel", insiste le président sortant, qui rappelle aussi sa mesure d’heures supplémentaires "qui ont augmenté le pouvoir d’achat : 53% des ouvriers les ont touchées, pourquoi les supprimer, alors que moins de 15% touchent le smic".
Il critique les mesures du candidat socialiste : "Et vous faites comment pour augmenter toutes les prestations, pour subventionner l’essence...".
Chacun des candidats a pu présenter ses propositions portant sur le pouvoir d’achat. François Hollande a donc expliqué que le Smic doit être aligné sur la croissance et que la TVA doit être diminuée sur le prix de l’essence. A ce sujet, Nicolas Sarkozy a insisté sur le fait que "2 centimes de moins sur le prix de l’essence, c’est l’augmentation du déficit".
"Vous faîtes comment pour augmenter tout ce que vous avez annoncé ?" interroge Nicolas Sarkozy. François Hollande a rétorqué : "Je n’augmente pas toutes les prestations, mais l’allocation de rentrée scolaire. Deuxièmement, vous dîtes je ne fais rien, je laisse les Français seuls face à au prix de l’essence. Et je veux redistribuer la TVA prise sur le prix de l’essence."
Nouvelle joutes portant sur les impôts et l’Education Nationale. A ce sujet, Nicolas Sarkozy affirme qu’il faut moins d’enseignants mais mieux payés. "Tout n’est pas une question de création de postes". "Vous serez incapable de créer des emplois (...) C’est de la folie dépensière" a lancé le président sortant au candidat du PS.
La dette de la France - recentrage du débat :
Le candidat du PS a rapellé que la dette a doublé depuis 2002 tout en reprochant au président sortant de s’être précipité pour accorder des largesses fiscales aux plus riches. Il a ensuite énoncé ses propositions sur le plan fiscal.
Nicolas Sarkozy a ensuite interpellé François Hollande : "vous qui êtes depuis si longtemps éloigné des affaires", de n’avoir pas voté un certain nombre de lois tout en l’accusant à nouveau de "mentir". Le président sortant a ensuite défendu son bouclier fiscal, et parlant même de "calomnie".
L’immigration :
Premier à prendre la parole sur ce sujet : François Hollande rappelle que Nicolas Sarkozy est "en responsabilité" depuis dix ans. "Les personnes qui entrent en France légalement sont au nombre de 200.000 par an. Maintenant vous dites 100.000. Ce que je dis : c’est que l’immigration économique, il faut la limiter, il y aura une discussion chaque année au Parlement" explique François Hollande. Avant de poursuivre : " les étudiants étrangers ? Nous avons besoin de ces talents. Les demandeurs d’asile ? Il mettent un an et demi avant d’obtenir une réponse ! Ils devront avoir une réponse en 6 mois. Pour l’immigration familiale, il devra y avoir des règles.Sur les conjoints des Français : sauf si le mariage est contestable, on ne peut l’empêcher. Donc, on ne peut fixer des objectifs qui seraient hors d’atteinte."
Au sujet de l’immigration, Nicolas Sarkozy se veut clair :"il faut réduire le nombre de personnes que nous accueillons. On ne peut pas demander aux Français de faire des efforts et d’accepter des personnes qui ne viennent que parce que nos prestations sociales sont les plus généreuses".
Le président sortant est ensuite revenu sur sa proposition au niveau de la justice ainsi que la nécessité selon lui, "d’organiser dans les consulats des examens sur la langue française". Enfin, "RSA et minimum vieillesse ne pourront être touchés qu’après dix ans de présence en France et 5 ans de cotisations".
Le candidat du PS a ensuite dû s’expliquer sur les centres de rétention : il souhaite des centres pour les familles mais Nicolas Sarkozy a ensuite attaqué le candidat socialistes sur une lettre où François Hollande a souligné que la rétention doit "être l’exception".
Le vote des étrangers concernant sur les élections municipales a ensuite été au centre du débat. François Hollande a tenté de mettre en difficulté Nicolas Sarkozy sur ses changements d’avis concernant le droit de vote des étrangers aux élections locales. Nicolas Sarkozy justifie ses changements par la "montée des communautarismes" en France.
Le président sortant explique : "Les premières communautés concernées viennent d’Afrique du Nord. Elles sont en majorité musulmane. Les tensions communautaires dont je parle viennent de qui, viennent d’où ? Elles viennent de l’absolue nécessité d’avoir un Islam de France et pas un Islam en France. C’est bien ça le problème. Pour les municipales, il y aura des demandes d’horaires différenciés dans les piscines municipales, des médecins différenciés."" (...) la France traite mieux l’Islam en France que les Chrétiens dans d’autres pays d’orient".
Le nucléaire :
Nouvelle confrontation d’idées sur la question du nucléaire. Nicolas Sarkozy a affirmé que l’énergie nucléaire est la "plus sûre du monde".
De son côté, François Hollande a dénoncé "le tout nucléaire" prôné selon lui par le président sortant. Après plusieurs joutes verbales, le débat a été arrêté par les deux journalistes.
Le style du président :
"Je crois que le président de la République, c’est quelqu’un qui doit prendre ses responsabilités " a lancé en premier point Nicolas Sarkozy. Avant de poursuivre : « Président de la République, c’est une des fonctions les plus dures qu’il soit. Je l’ai appris pendant 5 ans. On ne peut en revenir aux vieilles lunes »
François Hollande a ensuite détaillé quel président il sera s’il est élu lors du second tour de l’élection présidentielle. "Si je deviens le prochain Président de la République, je renoncerai au statut pénal du chef de l’Etat" assure François Hollande. « Je ferai en sorte que mon comportement soit exemplaire. Je constituerai un gouvernement paritaire. Les ministres ne pourront pas cumuler les fonctions avec un mandat local. J’engagerai de grands débats, les proportionnelles dans les élections législatives ... ».