La saison des baleines va débuter. L’encadrement pour les observer est essentiel. Professionnels et associations viennent de reconduire la charte d’observation des cétacés dans notre île. L’IRT devrait reconnaître cette activité économique d’observation des baleines.
Le vent de folie qui a touché la Réunion en 2008 va t’il se reproduire ? Souvenez vous, les embouteillages… partout. Sur les routes, pour voir des cétacés très proches de nos côtes. Sur l’océan où les professionnels de la mer et les autres tentaient d’approcher à leur tour, au plus près les baleines. En effet, en 2008, le Groupe local d’observation des cétacés (Globice), a recensé pas moins de 377 individus, soit deux à trois fois plus qu’en 2007.
"Une année chaotique et de folie parce que les baleines étaient nombreuses et proches de nos côtes" explique Laurence Del Vechio, Présidente de la commission mer du syndicat des professionnels des activités de loisirs (SYPMAL). Avant de poursuivre : "il nous faut faire des remarques et suggestions à toutes les personnes désirant observer et s’approcher des cétacés dans un esprit de respect mutuel et de sécurité respectif".
C’est dans cet esprit que les professionnels de la mer, l’IRT (Ile de la Réunion Tourisme), la Préfecture, les affaires maritimes, les syndicats des plaisanciers, la Diren (direction régionale de l’environnement) et les associations de pêche viennent de maintenir la charte d’approche et d’observation des baleines pour cette année.
La venue des baleines prés de nos côtes est vécue par les réunionnais et les touristes comme un spectacle vivant unique. Mais il faut préserver ces animaux, et un certain nombre de règles doivent être suivies. Ainsi, pendant la saison des baleines, "pas plus de 5 bateaux ne doivent être présents dans la zone d’observation de 300 mètres autour des baleines et s’il y a des nageurs dans l’eau, il ne doit pas y avoir plus de 3 bateaux", explique Laurence Del Vechio.
Ces recommandations doivent permettre une observation sans gêne pour les cétacés. La Présidente de la commission mer du syndicat professionnel des activités de loisirs poursuit : "il ne faut par exemple jamais courser une baleine. Si elle ne se met pas en position stationnaire, c’est qu’elle ne veut pas être observée.
Tout comme il ne faut jamais séparer les groupes de baleines, en particulier les mères et leurs baleineaux".
Pour que le message passe correctement, le groupe local d’observation des cétacés avec l’appuie de la Direction régionale de l’environnement va "distribuer 10 000 exemplaires de la charte a tout ceux qui possèdent un bateau immatriculé" afin qu’ils adhèrent aux principes de protection des cétacés. Car c’est "la seule barrière économique à la chasse à la baleine", annonce Laurence Del Vechio, avant de poursuivre : "pour arrêter la chasse il faut faire de l’observation, et développer des activités économiques autour de ce thème".
Une reconnaissance que l’Ile de la Réunion Tourisme pourrait reconnaître dans les mois à venir en favorisant le référencement de la Réunion parmi les sites extraordinaires d’observation des cétacés. Une façon de relancer le tourisme dans notre île mais de participer également à la protection de l’espèce. Car sur la saison 2008-2009, 1936 baleines ont été tuées dans le monde, dont 1004 par des baleiniers japonais.
La Réunion peut elle rester à la traîne des autres pays notamment de la Caraïbe ? Il faut savoir que le Japon réclame la reprise de la chasse commerciale, et continue de la pratiquer, sous couvert de chasse scientifique. Et en échange de coups de pouce économiques, des pays du monde entier soutiennent la position japonaise. Dans la Caraïbe, c’est le cas de Grenade, de Saint-Vincent, de Sainte-Lucie, d’Antigua et Barbuda, et de Saint-Kitts. La Caraïbe joue un rôle important car chaque petit pays représente une voix convoitée lors des votes de la Commission baleinière internationale (CBI).
Ainsi, depuis de nombreuses années, l’Eastern caribbean coalition for environmental awareness (ECCEA) lutte pour améliorer le sort des cétacés, et notamment des baleines. Pour sa secrétaire générale, Lesley Sutty, il faut avec l’aide des Directions régionales de l’environnement, mettre en place un sanctuaire pour les mammifères marins dans la région antillaise.
Le projet baptisé Maï d’Agoa, désigne "la mère de l’esprit des eaux", déesse de la mythologie amérindienne, et il débuterait par les Antilles françaises.
Parallèlement, l’ECCEA compte sur la sensibilisation de la population pour mettre fin à la mainmise intéressée du Japon dans la Caraïbe, mais aussi sur une alternative économique qui pourrait se révéler intéressante pour les pêcheurs : le tourisme bleu et notamment l’observation des mammifères marins.
Questions à Laurence Del Vechio
Le milieu de la mer est-il réellement sensibilisé au problème des baleines ?
Oui, il l’est de plus en plus. Et nous faisons des efforts quotidiens. Un exemple personnel en tant que responsable de la société Croisières et Découvertes. Nous envoyons cette année 18 personnes en formation pour mieux comprendre et connaître les cétacés d’un point de vue scientifique et réglementaire. L’idée, c’est d’augmenter nos connaissances des cétacés pour répondre à toutes les questions que les touristes nous posent, comme par exemple pourquoi ne faut-il pas toucher à un animal. C’est une formation de trois jours. Deux jours de théorie et un de pratique, sur l’eau. Car nous avons encore besoin d’acquérir des connaissances. Il y a des choses simples qui ne sont pas toujours appliquées. Comment quadriller par exemple, correctement, le territoire des cétacées, reconnaître les mâles, les femelles, les taties, qui protègent les jeunes à la place des mères en cas d’agression ?
Ce dont nous avons surtout besoin c’est d’un peu de temps. Vous savez, nous avons eu une année de folie, presque chaotique en 2008. Il y avait beaucoup de baleines, pas farouches du tout et qui naviguaient tout prêt de nos côtes. 2009 a été beaucoup moins stressante et nous espérons avoir en 2010 une très belle saison. De ce fait nous appliquerons les termes de la charte. Notre but est de protéger notre outil de travail. La prise de conscience a eu lieu, on demande maintenant que les choses se mettent en place.
Comment mettre en place la charte dans un milieu où il y a des resquilleurs ?
Nous travaillons généralement tous dans le respect de la règle et du droit. Cependant nous demandons aux services de l’état d’augmenter son contrôle pour que ceux qui n’ont aucune autorisation puissent être poursuivis. Nous sommes pour le respect du cadre légal. Il faut des bateaux autorisés, des licences en règle, de la sécurité et des personnels compétents.
Pensez vous un jour être reconnu comme secteur d’activité économique à part entière ?
Je crois que nous sommes sur la bonne voie. L’IRT devrait reconnaître les activités d’observation des baleines. Nous l’avions demandé à Didier Robert avant son élection à la présidence du Conseil Régional, car nous avons besoin de cette reconnaissance des activités de loisirs comme activités économiques essentielles. Nous espérons, au syndicat professionnel des activités de loisirs, que L’IRT va jouer son rôle dans l’île. Nous avons une belle activité d’observation des baleines ou encore du volcan mais nous ne sommes pas bien référencés dans ces activités. Il faut être plus volontaire.